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s’effondrent par l’action de la mer. Pour donner au rivage la solidité nécessaire, il fallait l’étayer par des digues. Ce premier travail, souvent interrompu par des inondations, fut pénible, long et coûteux ; mais le génie tenace de la nation triompha de la faiblesse de la terre et des résistances de la mer. Les ingénieurs, passèrent sans perdre de temps à la construction du port même, La marée s’y faisant vivement sentir, ils y disposèrent des écluses de grandes dimensions pour retenir l’eau des bassins. A la suite d’un avant-port où plongent deux jetées en granit que terminent deux môles, les navires venant de la mer traversent une première écluse qui s’ouvre dans le port intérieur, une seconde écluse les conduit dans un canal et ce canal conduit au port. C’est un bassin long de 1,100 pieds et large de 700. Au fond sont placées les cales de construction, les formes de radoub et les ateliers. L’eau, dans les bassins, est maintenue à la hauteur de 9 mètres et les cales de construction sont de dimensions à recevoir les plus grands navires ; le port de Jahde peut donc créer et abriter une flotte de premier ordre. On achève avec une ardeur extrême les fortifications de cet arsenal. Sur la digue du nord, trois forts en défendront l’entrée ; à l’autre extrémité du golfe, on fortifie l’endroit nommé Eckwarder-Horn… » Ajoutons qu’en 1870 Wilhemshaven ne fut pas attaqué par nos escadres, sans doute parce qu’il n’était pas attaquable. En tout cas, aujourd’hui, on peut dire du port de Wilhemshaven comme de celui de Kiel qu’il est imprenable, par mer du moins.

Tels sont les deux ports militaires de l’Allemagne. La nature a tout fait pour Kiel, la science et la volonté de l’homme pour Wilhemshaven. C’est parce que cette volonté, cette énergique persévérance, cette science, victorieuse de tous les obstacles, doivent être un enseignement pour ceux qui préparent l’avenir d’une grande nation voulant devenir une grande puissance maritime, que nous avons transcrit intégralement cette description des deux grands arsenaux de la marine allemande, création récente elle-même d’une volonté énergique et persévérante. Nous serons plus brefs désormais.

La Russie a deux grands ports militaires : Kronstadt et Nicolaïef.

Nicolaïef est le port du sud, de la Mer-Noire. Il est au confluent du Bug et de l’Ingul, à 25 milles de L’embouchure du Bug, qui, lui-même, vient se perdre dans le limon du Dnieper, et à 40 milles de Kinburn, la plus avancée des forteresses qui en défendent les approches. Un simple coup d’œil jeté sur une carte fait comprendre les difficultés de la navigation à travers les passes sinueuses, étroites, changeantes qui, de Kinburn, conduisent à Nicolaïef ; de simples