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se garderont de les accaparer pendant ce biennium. Ces jeunes gens poursuivront leur éducation littéraire ; ils s’exerceront dans l’art de composer et d’écrire, à cet âge où le style se fait avec la personne ; ils apprendront par l’étude des grandes littératures quel secours l’histoire de la vie intellectuelle d’un peuple apporte à qui en veut connaître l’histoire politique et sociale; ils comprendront, en suivant la conférence de philologie et d’histoire grecques, que la philologie est l’indispensable science auxiliaire de l’histoire ancienne, puisque cette histoire nous est révélée par des textes dont la critique et l’interprétation réclament un philologue. Nous nous contenterons de traiter avec eux les principales questions de l’histoire générale ; mais déjà nous les munirons de connaissances bibliographiques, de notions sommaires, mais précises de paléographie, de diplomatique et de chronologie. Ce sont encore là des sciences auxiliaires ; mais la modestie de l’épithète ne doit pas tromper sur l’importance de la chose: ces sciences ne sont pas l’histoire, pas plus que l’outil n’est l’œuvre ; mais elles sont nécessaires à l’historien comme à l’ouvrier l’outil. Ainsi, pendant ces deux premières années, un commencement d’instruction pratique viendra s’ajouter à l’enseignement général. Quand les étudians seront licenciés, ils se prépareront pendant deux années au concours d’agrégation. En étudiant les auteurs dont on leur demandera, au concours, l’explication et le commentaire, ils s’exerceront à lire un écrivain ou un document, à définir les termes historiques, lesquels, désignant les institutions et les usages, ont une histoire et, si je puis dire, une géographie ; car ils ne signifient pas la même chose à des momens et dans des lieux différens, et l’on commet de graves erreurs pour ne pas les traiter comme des personnes, qu’il faut placer dans le milieu historique et géographique où elles ont vécu. Enfin la préparation des questions historiques, indiquées au programme sous le nom de thèses, obligera l’étudiant à écrire sous l’œil du maître quelques chapitres d’histoire. Il n’y a pas de doute que ces jeunes gens seront mieux préparés que leurs devanciers au travail historique. Pour se former au professorat, ils auront, pendant toute la durée de leurs études, des exercices hebdomadaires où ils apprendront comment il faut enseigner, avec quelle simplicité, avec quelle clarté, avec quelle méthode, en laissant de côté l’appareil des recherches et de l’érudition.

Je n’ai parlé que des étudians proprement dits de la faculté; mais les élèves de l’École normale et de l’École des chartes sont aussi les bienvenus aux conférences d’histoire. Ils y choisissent ce qu’il leur plaît d’y prendre. La Sorbonne est un terrain commun pour des jeunes gens qui ont profit à se rencontrer ; car le goût français des instituts isolés clos de murailles est aussi un obstacle