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y acquérir le droit de vivre des misères des populations. Aussi, quand le parlement turc a disparu, est-il tombé non-seulement sous les injonctions de la Russie, mais encore sous la coalition des abus menacés, qui ne pouvaient plus être en sécurité sans sa destruction.

Le système administratif qu’à la place d’institutions politiques la Porte Ottomane se propose d’introduire dans l’empire n’est qu’un développement de la loi des vilayets. Le pays est divisé en provinces ou vilayets, en livas ou sandjaks, en cayas et en nahiès. Le liva ou sandjak répond à peu près à notre arrondissement, le caya à notre canton, la nahiè à notre commune. À la tête du vilayet est placé un gouverneur ou vali ; celui-ci a sous ses ordres : 1o un mustechar, qui est proprement un sous-gouverneur, un adjoint et qui, dans le projet de la commission internationale, doit être chrétien si le vali est musulman, et réciproquement ; 2o un defterdar chargé de la direction des finances ; 3o un directeur de la justice ; 4o un mektoubdji ou chef de la correspondance ; 5o un directeur des travaux publics, de l’agriculture et du commerce ; 6o un directeur de l’instruction publique ; 7o l’alag-bey ou directeur de la gendarmerie. Aucun de ces fonctionnaires n’a d’ailleurs d’initiative personnelle ; ils sont soumis aux ordres du vali, lequel communique seul avec le gouvernement et ne considère les chefs de service que comme des instrumens dont il use à son gré. C’est à côté du gouverneur qu’est placé le conseil du méghiz ; seulement ce conseil, d’après le projet de la Porte Ottomane, n’est formé que des six directeurs que je viens d’énumérer ; tandis que la commission internationale demande qu’il soit composé du vali, du mustechar, du defterdar, du directeur de la justice, du directeur de l’instruction publique, du directeur des travaux publics, du commerce et de l’industrie, du mufti, des chefs des communautés religieuses et de huit membres choisie par le conseil-général parmi ses membres. Il existe, en effet, un conseil-général soi-disant élu, mais dont le gouverneur pour les Turcs, et les chefs des communautés chrétiennes pour les chrétiens, sont les seuls électeurs. Le projet ottoman donne même à ce conseil-général le droit de nommer une commission permanente de dix membres, organisée sur le modèle des nôtres, commission que le projet européen supprime et remplace avantageusement par un méghiz plus complet et mieux organisé que celui du projet turc. D’après ce que j’ai dit plus haut, on comprendra sans peine que le méghiz, ou la commission permanente, n’offrent cependant ni l’un ni l’autre de garantie sérieuse. Le projet turc n’accorde au méghiz qu’un pouvoir consultatif. « Le conseil d’administration, dit-il, exprimera son avis sur toutes les questions que le vali lui soumettra soit pour se conformer à la présente loi ou à une