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chambre, et en arrivant auprès du lit de la princesse, elle m’a dit en me présentant Bewis[1] emmaillotté :

— Voici un nouveau-né qui s’est passé de vos charmantes constatations. Comment trouvez-vous mon poupon, docteur? N’est-ce pas qu’il ressemble à Mme Hansler? Avez-vous une nourrice à nous donner? Que va dire le gouvernement? Et mon père Deneux qui n’était pas là! Courez vite au télégraphe et faites prendre les armes à la garnison.

Tout cela était dit fort gaîment et je me suis empressé de donner la réplique à la nouvelle accouchée. M. Deneux est arrivé, et avant qu’il eût eu le temps de s’armer de ses lunettes pour examiner cet intrus, Madame et sa camériste ont fort bien joué leur rôle;. Nos plaisanteries sur ce sujet ont eu un résultat singulier. Voici ce qui s’est passé. Tout en parlant de nourrices, de biberons et de langes, j’ai dit à la princesse :

— Mais Madame a-t-elle pensé à une layette? veut-elle qu’on lui en envoie une de Paris ou que l’on en fasse composer une à Bordeaux?

— Grand merci, docteur ! j’en ai une.

— Madame l’a-t-elle ici?

— Non, elle est à Bordeaux. Elle m’a été envoyée par des amis. Je ne voudrais pas devoir au gouvernement de Louis-Philippe les vêtemens de mon enfant. Ce sont là des choses trop intimes. J’aurais sans cesse ces objets sous les yeux, je ne veux pas recevoir de vos amis un pareil cadeau. J’ai encore un certain nombre de petites affaires qui ont servi à mes, enfans et que je serai enchantée de retrouver. Ce qui m’embarrasse, c’est de faire venir tout cela ici.

— Mais c’est fort simple. Que Madame fasse mettre ces choses à l’adresse du général, et la caisse viendra ici tout droit.

— Oh ! très bien! Le général comprendra mes motifs. Mais puisque nous traitons ce chapitre, je vous avoue que je n’ai pas de barcelonnette. Demandez-en une très simple, petite, commode, pouvant se poser partout. Priez qu’on me la garnisse en vert, c’est plus doux aux yeux des enfans.

On voit que, si le gouvernement ne fournit pas les langes, il se chargera au moins du berceau. Nous avons beaucoup jasé sur ces matières importantes. M. Deneux, qui se sentait sur son terrain, a déployé une variété de connaissances pratiques qui font l’admiration de Mme Hansler.

Dans l’après-midi, nous étions occupés de choses non moins intéressantes. Madame se montrait fort gaie et nous avions tous le cœur

  1. Le petit chien de la duchesse de Berry.