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l’addition de quelques millions au service de la dette publique, et les chambres italiennes, tentées par le progrès constant des recettes, se relâchent de leurs habitudes de rigide économie. On avait commencé par classer des chemins de fer dont l’exécution devait se répartir sur dix années; dans les derniers jours de 1879, on a considérablement accru ce programme, dont l’accomplissement exigera vingt années. On y a ajouté en 1880 et 1881 d’autres travaux à répartir également sur une période de dix années et qui ont pour objet l’agrandissement des ports, l’amélioration des canaux et des rivières, le dessèchement des marais, l’assainissement des régions désolées par les fièvres. Tous ces travaux sont, en eux-mêmes, des œuvres excellentes; mais, malgré le soin qu’on prend de les répartir sur des périodes plus ou moins longues, leur trop rapide multiplication engage l’avenir pour longtemps et ajoute d’année en année une charge plus lourde au budget. Le ministre de la guerre, qui est, en Italie comme partout ailleurs, le grand dépensier, rencontre dans les ébullitions de l’amour-propre national un appui plein de périls pour les finances. Enfin, il est difficile d’approuver des dépenses comme le vote d’une subvention de 50 millions à la ville de Rome pour la construction d’édifices publics et pour des travaux de vicinalité, et le vote d’une subvention de même importance pour apaiser la jalousie et les réclamations de la ville de Naples. Des votes de cette nature compliquent singulièrement et rendent plus pénible la tâche d’un ministre des finances. Dans l’analyse anticipée qu’il faisait, cette année, des budgets jusqu’en 1884, M. Magliani avertissait la chambre qu’en conséquence des votes déjà acquis du parlement, 1881 avait à supporter 65 millions de dépenses extraordinaires, que 1882 en avait à supporter pour 83 millions, et 1883 et 1884 pour 79 millions, si de nouveaux votes ne venaient pas encore grossir ces chiffres. Il ne pourra être subvenu à ces dépenses que par des aliénations de biens nationaux et des émissions de rentes : or les unes épuisent un patrimoine qui devrait être réservé comme une ressource pour les jours de crise, et les autres empêchent le crédit de l’Italie d’atteindre un niveau en rapport avec la situation réelle du pays.

Il y a, en effet, dans cette situation un élément de force et de sécurité qu’il ne faut pas perdre de vue, c’est l’action continue d’un amortissement très puissant. La monarchie unifiée a dû prendre à son compte les emprunts négociés par les gouvernemens qu’elle a remplacés ; ce sont ces emprunts qui figurent dans le budget sous la rubrique des dettes amortissables. Ils avaient été presque tous contractés pour des périodes assez courtes, en vue d’un amortissement rapide. Il en est résulté pour les finances italiennes une charge