Page:Revue des Deux Mondes - 1881 - tome 48.djvu/649

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sont cités les noms des artistes collaborateurs de L. Alberti (noms qui n’ont rien à voir avec ceux cités par Vasari et les rares écrivains qui se sont occupés de San-Francesco de Rimini). Le recueil va changer d’étiquette ; il figurera désormais dans les archives de Sienne sous la rubrique : Lettres Malatestiennes.

Tout d’abord, pourquoi et comment ces lettres sont-elles à Sienne ? Que les archives de la commune de Sienne aient conservé les lettres de celui qu’elle appela au moins une fois à conduire ses troupes contre les ennemis du dehors, il n’y aurait rien là que de fort naturel — (et de cette origine, le dépôt ne contient que des signatures du fameux condottiere) ; — mais la présence dans ce même dépôt de correspondances qui lui sont adressées est inexplicable, puisque des lettres d’un caractère purement privé font d’ordinaire partie des archives de celui qui les reçoit. Elles devaient se trouver à Rimini et disparaître comme les autres. La raison de cette anomalie est très singulière, et on verra que dans ces investigations, on est quelquefois servi ou déçu par de singuliers hasards. En 1454, la république de Sienne était en guerre avec le comte de Pittigliano ; Sigismond Malatesta s’était illustré par ses campagnes contre Sforza et le roi d’Aragon, son épée de condottiere était à ceux qui mettaient l’enchère la plus élevée ; Sienne lui confia sa défense. A l’automne, il vint mettre le siège devant Sorano ; et, aussi perfide que vaillant, Malatesta médita de trahir les Siennois et de s’emparer de leur territoire ; les espions de la commune le dénoncèrent ; à la faveur de la nuit les gardes de la ville descendirent en plaine et surprirent Sigismond dans son campement ; ils allaient s’emparer de sa personne quand, à moitié vêtu, il put sauter sur son cheval et prendre le champ. On séquestra sa tente, ses bagages et sa correspondance, où on devait trouver la preuve de ses perfides projets. Or, en 1454, on décorait l’intérieur du temple de Rimini et L.-B. Alberti préparait l’érection du dôme qui devait couronner l’édifice. Chaque jour on tenait le seigneur au courant de la marche des travaux, et, suivant le cours des événemens, ses correspondans habituels lui adressaient leurs rapports, sa maîtresse lui donnait de ses nouvelles et de celles de ses enfans, ses amis restaient en relation avec lui ; les communications de toute nature enfin lui arrivaient de toutes parts, et, naturellement, il gardait les dépêches que lui apportaient les courriers. Cette série, égarée jusqu’alors en quelque casier du dépôt, car elle ne se rattachait point à l’histoire de la ville et ne se composait que de documens privés, M. Banchi l’étudiait pour écrire cet épisode de la guerre contre le comte de Pittigliano dans l’Archivio storico de Florence, et nous arrivions à Sienne au moment même où l’honorable directeur la déchiffrait. Chacun de ces noms qui n’avaient aucune signification pour ceux qui ne vivaient point dans l’intimité