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opérations qui semble manquer à ses émules. Elle se propose, en effet, non-seulement de traiter de l’ouverture des rues dans les villes, mais aussi de soumissionner de grands travaux publics. L’ancienne Société immobilière avait eu la même ambition ; à Paris, elle avait achevé la rue de Rivoli ; à Marseille, elle avait construit la rue Impériale. Percer des boulevards, créer des quartiers rentre bien dans le cadre d’une société foncière, mais c’est peut-être le dépasser que de terrasser des routes, creuser des canaux ou construire des chemins de fer ; en tout cas, ces entreprises multiples peuvent fournir matière à de grands développemens.

La Foncière de France et d’Algérie clôt jusqu’à présent la série des nouvelles sociétés foncières. Nous ne voulons pas dire qu’elle est destinée à réussir mieux que ses aînées, ni qu’elle comblera toutes les lacunes, et qu’après elle la mobilisation de la propriété foncière sera complète : nous avons tenu seulement à bien préciser son caractère et à montrer qu’il s’adapte aux nouvelles mœurs de notre temps. Le succès de chaque entreprise dépend avant tout de ceux qui la dirigent et, tout en reconnaissant que les sociétés foncières nouvelles réunissent à cet égard les meilleures conditions, nous nous attachons surtout à faire ressortir, avec leur objet, le sentiment public qu’elles expriment en quelque sorte. Ce sentiment manifeste est celui qui inspire à chacun l’envie de participer à la propriété commune sous la forme préférée aujourd’hui, la forme mobilière ; or faire du sol, des constructions qu’il supporte et des revenus qu’il procure, des titres en papier qu’on plie et dépose dans un portefeuille, qu’on se passe de la main à la main, semble le dernier mot du progrès ; c’est, en tout cas, à notre époque, le fait saillant et universel ; il n’y a qu’à le constater en l’expliquant.


III

On vient de voir le Crédit foncier jouant un rôle actif dans la création des sociétés nouvelles dont l’utilité a été démontrée ; les avantages directs ou indirects qu’il est appelé lui-même à en recueillir ne peuvent faire l’objet du moindre doute et valent bien qu’on s’y arrête.

Quoique fondé depuis près de trente ans, quoique reconstitué à plusieurs reprises, le Crédit foncier ne semble pas avoir joué en France le rôle auquel il était destiné, et cela en dépit des efforts de tous les habiles gouverneurs placés successivement à sa tête. Sans aucun doute ses opérations se sont largement accrues, la masse des prêts qu’il a consentie est énorme ; grâce surtout au mode d’obligations à lots, dont le privilège lui est demeuré à l’encontre de toutes les sociétés financières libres, il a pu recueillir un nombre toujours croissant de capitaux. Ses emprunts anciens et nouveaux,