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la notion du magnétisme et donner des séances, presque des représentations publiques. Né ou importé en France dès sa naissance, le magnétisme animal a fait de notre pays sa patrie d’adoption, et on peut dire que, s’il a rayonné dans ce monde, c’est en partant de ce centre où il venait se retremper à l’occasion. Vérités, absurdités, erreurs calculées ou inconscientes, théories mystiques, tentatives d’interprétations raisonnées, presque tout l’édifice a été dessiné, élevé au-delà de ce que comportaient les fondations, et s’est effondré à Paris. Braid est le seul étranger qui, hors du continent, ait de haute volée abordé la recherche, et son intervention a été magistrale en ce que, déplaçant l’objectif, il a fait litière des anecdotes rejeté les pouvoirs occultes, et réduit le magnétisme aux proportions des sujets accessibles à la science.

La première, ou tout au moins la plus sérieuse tentative faite pour donner au magnétisme animal une base scientifique, avait été celle de Eschenmayer, Kieser et Nasse, tous trois professeurs distingués, l’un à Tubingue, l’autre à Iéna, le troisième à Halle. Leur journal, fondé en 1817 sous le titre : Archives du magnétisme animal, a vécu plus longtemps que la plupart des publications de ce genre et a fini, comme toujours, par se perdre dans les récits on les fantaisies de rédacteurs sans compétence. En matière de sentimens, les engoûmens durent peu, et les trois rédacteurs n’avaient pas réussi à faire passer le magnétisme du domaine de la foi dans celui de la raison. L’introduction, sincère avec un mélange de naïveté, mériterait d’être reproduite, si l’épreuve avait abouti. On y retrouve la phraséologie scientifique allemande avec des formules presque contemporaines, tant l’esprit d’une nation se modifie peu par le temps et s’adapte dans son intégrité aux sujets les plus divers. Il s’agit de la lutte de la vie moderne, de ses aspirations vers les mystères les plus voilés et de la culture des intelligences appelées à élucider les problèmes du magnétisme en même temps que ceux de la politique. La physiologie doit, après avoir discerné le faux et le vrai, poser les lois fondamentales.

L’hypothèse pleine d’illusions était que l’étude des phénomènes électriques, tels qu’on les devine dans le fonctionnement du système nerveux des animaux et surtout de l’homme, fournirait la clé, qu’on ouvrirait avec elle la porte aux applications thérapeutiques. C’était vouloir résoudre l’inconnu par l’inconnu, et de cette honnête entreprise il n’est rien resté, pas même le souvenir, quoique le recueil contienne des observations du plus haut intérêt.

Vinrent ensuite les rares, mais longues discussions des académies, mauvais endroits pour les débats, qui aboutissent habituellement à une négation. Tout rejeter en pareille occasion est aussi puéril