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exterminés par l’homme, devenu plus industrieux à la fois et plus redoutable. Cet âge du renne a été reconnu par tous les savans qui se sont livrés à des recherches sur les animaux éteints et les documens préhistoriques, qui ont fouillé les cavernes ou les stations dans lesquelles domine le silex taillé du type de la Madelaine ; c’est le « magdalénien » de M. de Mortillet, et sur cet horizon bien connu viennent se ranger les grottes ou les abris célèbres des Eyzies, de Laugerie, de Bruniquel et tant d’autres de la Dordogne, de la région toulousaine, de l’Ariège, de la Savoie, de la Belgique, etc, qu’il est inutile d’énumérer, enfin la station en plein air de Solutré. Comme le dit M. de Nadaillac, le mammouth est encore assez fréquent au commencement de la période, mais le renne domine, et vers la fin, il reste le représentant exclusif de toute la faune.

Ce n’est pas la période elle-même, parfaitement explorée, mais ses caractères, qui ont été généralement méconnus. En faisant coïncider l’âge du renne, ou mieux encore l’âge du renne excluant le mammouth avec l’époque du plus grand froid, on rencontrait juste, et cela doit être ainsi ; un froid plus violent concorde toujours avec un climat et des saisons extrêmes, et celles-ci, en appauvrissant la végétation, rendent précaire le maintien d’une foule de plantes. Il en résulte une double cause concourante l’extinction des grands pachydermes, les derniers survivans d’une série longtemps si puissante. Leur extinction n’a pu être subite, et les croquis, aussi bien que l’ivoire travaillé des hommes des cavernes, le démontrent bien, mais la rareté croissante de ces animaux réduits à ne plus sortir de certains cantons et diminuant en nombre, comme en force, dans la mesure même des progrès du froid, fait voir également que leur déclin était dû à une cause dont la persistance a amené finalement leur disparition. Cette cause ne saurait être attribuée qu’à une aggravation des conditions extérieures de plus en plus défavorables; c’est-à-dire au froid et à la sécheresse réunis.

Le froid n’est pas venu de l’extension des glaciers, ou, si l’on veut, l’extension des glaciers n’a pas été la conséquence du froid, comme l’on a souvent affecté de le croire ; non-seulement parce qu’il faut beaucoup de neiges pour imprimer aux glaciers une marche incessamment progressive, circonstance qui implique plutôt une température humide et par cela même égale, mais aussi parce que cette marche en avant, inaugurée dès avant la fin du tertiaire, ne s’est ensuite jamais arrêtée, en sorte que c’est justement dans la première moitié des temps quaternaires, époque où se place cette extension, que les grands pachydermes sont les plus nombreux et les plus forts, en même temps que la flore se montre la plus opulente. Mais le climat devint plus extrême, moins pluvieux et la température plus basse en hiver, à partir d’un moment donné ; de