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pas de telles et si étranges coïncidences. M. de Nadaillac ne voit, comme nous, dans ces éclats de silex, que des fragmens dont l’utilité pratique ne semble pas saisissable.

Les découvertes de restes d’instrumens humains signalées par M. Whitney dans les graviers aurifères de la Californie, rapportés selon toute vraisemblance à l’âge pliocène, étaient de nature à frapper l’esprit. Ces graviers mêlés d’argiles et recouverts de lits d’origine éruptive sont riches en ossemens de mammifères et en empreintes de plantes fossiles. Les mastodontes et les éléphans dominent parmi les animaux ; les plantes examinées et décrites par M. Léo Lesquereux annoncent une végétation très différente de celle de la Californie actuelle : point de conifères, mais des charmes, des ormes, des aunes et d’autres arbres, maintenant absens de la région californienne; rien ne manquerait à la démonstration si les découvertes de M. Whitney n’étaient pas demeurées entachées d’une certaine obscurité, de nature à faire craindre que ce savant, induit en erreur, ne se soit fait l’éditeur responsable d’explorations qu’il a avoué à la fin n’avoir pas dirigées en personne.

Les silex supposés taillés de main d’homme, retirés d’un bassin lacustre portugais dont l’âge mio-pliocène n’est pas douteux, par M. Ribeiro, à Otta, au pied du Monte-Redondo, paraissent tout aussi problématiques à M. P. Cazalis de Fondouce, juge si sûr en pareille matière, si l’on s’en rapporte à un récent article de ce savant[1].

Le plus sûr est de renoncer pour le moment à l’homme pliocène, à plus forte raison à l’homme miocène, pour s’attacher à la définition de l’âge qui suit immédiatement le tertiaire et à l’appréciation des indices merveilleux qui sont venus attester la présence d’une race intelligente, contemporaine des derniers éléphans qui aient foulé le sol européen.

Ici nous sortons de la conjecture et du peut-être ; mais, à raison même de cette certitude, nous devons préciser les notions de tout genre, de nature à nous faire connaître ce que furent les premiers temps quaternaires. Avant d’introduire l’homme, il est juste de déterminer l’aspect, les proportions et les perspectives de la scène où il viendra se produire; mais, pour s’engager à coup sûr dans cette voie, il faut observer une mesure exacte-, c’est-à-dire ne pas considérer un seul phénomène qui masque tous les autres. Par une méthode contraire, il est nécessaire de les combiner tous, sans jamais perdre de vue leur importance relative. Nous arriverons

  1. Voyez la Question de l’homme tertiaire en Portugal, par M. Cazalis de Fondouce, dans la Revue des sciences naturelles, IIIe série, t. I, n° l; Montpellier, 15 septembre 1881.