Page:Revue des Deux Mondes - 1881 - tome 47.djvu/614

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

parfaitement ronds dont les bords s’élèvent en pente douce à l’extérieur et se creusent à pic en dedans ; le fond est plat, profond, ce sont des creux, presque des puits. On les a désignés par le nom des grands astronomes Copernic, Descartes, Aristote, Platon, Tycho, etc. On ne peut les nommer tous, car il y en a des milliers de toute taille, depuis 60 kilomètres jusqu’à quelques mètres, jusqu’à quelques trous à peine visibles, les plus profonds ont 5,000 mètres, ce qui est le relief du Mont-Blanc.

Toute la surface lunaire n’est pas également riche en cratères ; la partie supérieure en contient peu, la moitié inférieure en est criblée ; ils se mêlent, se superposent et s’enchevêtrent sans ordre. A les bien examiner, on reconnaît qu’ils sont d’âge différent, que, souvent, un dernier venu s’est placé sur un fond qui en contenait déjà de plus anciens, et au milieu de cet espace on distingue le plus remarquable de tous, Tycho, non parce qu’il est le plus large ni le plus profond, mais parce qu’il est le centre de traces brillantes qui en partent et divergent comme les méridiens tracés sur une sphère divergent du pôle. Ce ne sont point des fentes ni des saillies, ce sont des lignes plus brillantes que le fond, qui traversent les cratères environnans sans s’y mêler ni sans les effacer et s’étendent jusqu’au quart de la surface lunaire. En y regardant bien, c’est un caractère général qu’on retrouve autour de Copernic et de tous les grands cratères, bien qu’avec moins d’évidence. Il semble qu’une force intérieure ait fait éclater la surface en la poussant du dedans au dehors, comme une pierre fait éclater la vitre autour du point qu’elle a frappé.

Il est manifeste que tous ces cratères ont été formés dans des circonstances identiques qui se sont reproduites un nombre considérable de fois à des époques successives, avec des intensités inégales, et qu’ils sont dus à l’action de forces émanant de leur centre. Il y a deux manières, il n’y en a que deux de les expliquer : ou en admettant que cette force agisse de l’intérieur de la lune, ou bien en supposant qu’elle vienne du dehors.

Si elle est intérieure, ce sont des volcans pareils aux nôtres ; c’est en effet, ce qu’on admet en général, ce qui paraît au premier abord ne pouvoir être contesté ; et ce qui donne du poids à cette opinion, c’est qu’on voit généralement, au milieu même du cratère, un mamelon quelquefois élevé de 1,500 mètres, comme on voit le cône du Vésuve au milieu de la Somma. En y regardant de plus près, c’est une opinion qu’on ne peut soutenir. On trouve, en effet, des différences essentielles entre les cratères de la lune et les volcans d’Italie ou d’Auvergne. Dans ceux-ci, le cône central offre une régularité parfaite puisqu’il est dû à la retombée des cendres lancées de