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de la plaine, le sol se montre fertile et, quand on atteint le sommet, apparaissent tout à coup le village, l’église, les maisons des missionnaires bâties dans le style anglais, des fermes, des champs bien cultivés. On imagine si le révérend Taylor et sa femme furent joyeux de recevoir les commandans de l’Erebus et du Terror. Le programme des excursions et des études ne tarda point à être arrêté : se livrer à la pêche du lac et opérer des sondages en divers endroits, faire l’ascension de la plus haute montagne des environs, le Puki-Nui, et en déterminer l’élévation, explorer le grand cratère et visiter les sources d’eau chaude. Au matin, on partit pour le lac Mapere ; une pluie violente vint à tomber, et ce fut bonheur de trouver abri dans une petite chapelle en bois que les Maoris devenus chrétiens avaient bâtie au milieu d’un village. On voyait éparses quelques habitations et des jardins élégans remplis de pêchers et de groseilliers du cap de Bonne-Espérance. Après avoir traversé un marécage, on arriva au bord du lac. On fit la pêche; elle rapporta tout juste des mulettes et quelques chétifs poissons. La petite caravane gagna le Puki-Nui, la grande montagne de la contrée ; le pic dépassant tous les autres sommets des environs, la vue porte au loin sur le pays et sur la mer des deux côtés de l’île. Le temps était clair; on distinguait les pointes qui forment l’entrée de l’estuaire de la Hokianga. M. Taylor pouvait indiquer à ses compagnons l’endroit où se trouvait l’établissement des missionnaires wesleyens. Le grand progrès de la culture chez les Maoris devenus chrétiens était manifeste, et le capitaine Ross constate l’influence heureuse de la prédication de l’évangile dans cette région qui fut le théâtre de maint combat sanglant et des atrocités de l’exécrable Hongi. En ce moment, les indigènes dispersés sur les points les plus fertiles bâtissent des hameaux et vivent dans le calme et le bien-être. Au lendemain, de bonne heure, on se mit en route pour une visite aux sources chaudes de Takuine. Traversant une contrée nue et montagneuse, on prit intérêt à des cimes volcaniques s’élevant au nombre de trois dans une dépression du plateau. Après trois heures de marche, on arrivait au premier lac ; la température de l’eau était à 23 degrés centigrades, tandis que le thermomètre marquait à l’air seulement 16 degrés. Dans un petit lac non loin du premier ou trouva 18 degrés et 19 dans les jets gazeux qui surgissent d’une manière incessante. Dans le sol d’argile où viennent sourdre les eaux sulfureuses, le commandant fit creuser des trous ; la chaleur y monta jusqu’à 79 degrés. Comme toujours en pareille occurrence, on se livra au plaisir de faire cuire des œufs sans avoir besoin d’allumer du feu. Le pays d’alentour est triste et d’aspect désolé ; à peine dans les ravins la teinte brune du sol est-elle interrompue par de rares bouquets de fougère. Le temps se montrant peu favorable aux excursions, le capitaine Ross et son monde retournèrent