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les physiciens conçurent la pensée d’une vaste entreprise d’observations magnétiques sur divers points du globe, en particulier sous les hautes latitudes de l’hémisphère austral. Un mémoire à ce sujet ayant été adressé au ministre, le gouvernement de la Grande-Bretagne se hâta de préparer une expédition. Deux navires de la marine royale, bientôt armés, furent mis sous le commandement de James Clark Ross. On emmenait des médecins et, par suite d’un choix judicieux, ces médecins étaient en même temps de vrais naturalistes. Le voyage est demeuré célèbre par l’importance des résultats obtenus. A l’égard de la Nouvelle-Zélande et des îles qui en sont plus ou moins rapprochées, il a fourni des renseignemens du plus réel intérêt[1].

Le 5 octobre 1839, les vaisseaux Erebus et Terror, perdant de vue la pointe la plus avancée de la côte d’Angleterre, se dirigeaient sur Madère afin d’atteindre au plus vite l’Océan-Pacifique. Après une reconnaissance fort instructive de l’île Kerguelen et un séjour à la Tasmanie. l’expédition anglaise ayant fait voile du port d’Hobart-Town, à son tour s’arrêtait, à la fin du mois de novembre 1840, dans les eaux des îles Auckland. On verra donc la contrée en une autre saison que les derniers navigateurs français et américains. En ces parages, l’impression de fraîcheur est toujours un peu pénible; ce n’est plus le doux climat des côtes australiennes; à la basse température s’ajoute l’humidité persistante. Le pays néanmoins, par sou caractère, invite à l’étude le géologue ; le botaniste Joseph Hooker se prend d’enthousiasme en contemplant la végétation de ces îles placées sous uns très haute latitude pour l’hémisphère austral.

Les vaisseaux du capitaine Ross ayant jeté l’ancre sur la côte occidentale du port du Rendez-vous, deux panneaux peints, fixés sur de hautes perches, attirent aussitôt l’attention. Tout l’état-major fort intrigué de savoir ce que les inscriptions peuvent apprendre, on se hâte d’envoyer à terre un jeune officier. L’un des panneaux portait en lettres noires, sur un fond blanc, cette annonce : « Les corvettes françaises l’Astrolabe et la Zélée, parties de Hobart-Town, le 25 février 1840, mouillées ici le 4 mars et reparties le 20 dudit mois pour la Nouvelle-Zélande. — Du 19 janvier an 1er lévrier 1840, découverte de la Terre-Adélie et détermination du pôle magnétique austral. » Le second panneau, tout noir, indiquait en lettres blanches l’arrivée du navire des États-Unis, le Porpose, le 7 mars 1840, et son départ pour la baie des Iles, le 10 du même mois.

L’Erebus et le Terror reposant en un lieu bien à l’abri des vents,

  1. Voyage of discovery and research in the southern and antarctic regions during the years 1839-1843, by captain sir James Clark Ross, 2 vol. London, 1847.