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LE PLAISIR DU BEAU
ET LE
PLAISIR DU JEU
D'APRES L'ECOLE DE L'EVOLUTION

I. Herbert Spencer, Principes de psychologie, traduits par MM. Ribot et Espinas ; Essais de morale, de science et d’esthétique, traduits par M. Burdeau. — II. Grant Allen, Physiological Æsthetics. The colour sense, its origin and development. — III. James Sully, Sensation and Intuition, Studies of psychology and œsthetics.

J’observais l’autre jour un très jeune enfant qui jouait dans une chambre : un rayon de soleil étant venu à passer au travers des volets fermés, l’enfant courut vers ce trait lumineux qui fendait l’air, pour essayer de le saisir entre ses mains ; à son grand étonnement, la clarté blanche se déroba à ses prises : elle était seulement dans son œil. L’humanité a fait dans le cours des temps bien des découvertes analogues. Le beau et le bien, après avoir été considérés longtemps comme des réalités métaphysiques, tendent pour ainsi dire à rentrer en nous ; ce ne sont plus, aux yeux des savans modernes, que les effets de notre propre constitution intellectuelle. Le beau, par exemple, selon l’école de l’évolution, se ramène à une certaine espèce de plaisir, lié comme tout plaisir au développement de la vie : supprimez les êtres vivans dans l’univers, vous en supprimez le beau, de même qu’en étant l’œil vous ôtez la lumière et les couleurs.

En esthétique comme en métaphysique, la critique de Kant a