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aussitôt de diviser un bureau en deux en séparant des attributions qui se conciliaient fort bien ensemble, et l’on dispose ainsi de trois ou quatre places ; mais les deux bureaux, bien que séparés, sont tellement connexes qu’ils ont besoin d’une impulsion commune : on forme une division, et voilà un service de plus. Quand le nouveau chef aura quelques années de grade et qu’on voudra le récompenser, le partage de sa division en deux donnera naissance à une direction. C’est ainsi que le service des beaux-arts, qui ne formait qu’un bureau sous la restauration et le gouvernement de juillet et qu’une division sous l’empire, est dirigé aujourd’hui par un sous-secrétaire d’état avec un état-major égal à celui d’un ministère. Les services du ministère de la justice ne sont ni plus étendus, ni plus chargés qu’il y a cinquante ans ; le nombre des cours et des tribunaux est demeuré le même ; il n’y a ni plus d’officiers ministériels à nommer, ni plus de pourvois en grâce à examiner. Il suffit cependant de comparer la distribution des services dans les almanachs, nationaux de 1829, de 1847, de 1869 et de 1881, pour voir comment, en subdivisant à l’infini la même quantité de besogne, on arrive à doubler le personnel et les dépenses d’un ministère. Fixer par une loi les cadres des administrations publiques comme on a fixé les cadres de la marine et de l’armée, en sorte qu’il ne soit pas plus licite de créer un bureau qu’un régiment, est la réforme la plus utile que puisse entreprendre une assemblée nationale.

Avec de l’ordre et de l’économie, nos finances se rétabliraient promptement : il suffira à la nouvelle chambre de le vouloir pour qu’elles ne laissent rien à désirer. Notre nation est la plus laborieuse et la plus économe qui soit au monde : son incomparable activité répare incessamment les brèches faites à la fortune publique et donne naissance à de nouvelles sources de richesse. M. Gladstone calculait, il y a vingt ans, que chaque penny ajouté à l’income-tax rapportait 25 millions au trésor anglais : aujourd’hui le produit de ce penny ne peut être évalué au-dessous de 40 millions. Le revenu public, en France, n’a pas moins d’élasticité : le progrès normal des recettes, d’une année à l’autre, il y a vingt ans, pouvait être évalué à 30 millions : il doit être aujourd’hui de 50 à 60 millions avec un budget presque doublé. Les plus-values des deux derniers exercices ont été plus considérables ; mais il faut faire la part de circonstances accidentelles. L’importation des blés et des vins étrangers a valu au trésor des augmentations de recettes dont la continuation n’est pas à souhaiter. On en peut dire autant du développement anormal que le renchérissement du vin semble avoir fait prendre à la consommation des liqueurs alcooliques. Enfin les recettes de l’enregistrement et du timbre et le produit de l’impôt