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de la convention un mandat en quelque sorte illimité. Il était difficile que l’instruction publique ne ressentît point le contre-coup d’aussi grands changemens. D’une part, en effet, l’exécution des décrets du 27 brumaire et du 7 ventôse soulevait d’excessives et très nombreuses difficultés ; d’autre part, on ne pouvait guère toucher à la constitution sans modifier en même temps la législation sur tous les points essentiels. Tel fut du moins l’avis qui prévalut dans la commission des onze et que traduisit son rapporteur, Boissy d’Anglas. Le passage est à citer : « À côté de l’édifice sacré de l’organisation sociale, dit-il, s’élèvera celui de l’instruction qui doit lui servir d’auxiliaire et en faire essentiellement partie. L’assemblée constituante, après avoir tout fait pour la liberté, eut le tort de ne rien faire pour l’instruction… Quant aux montagnards, — Boissy d’Anglas passe sous silence la législative, — ces féroces ennemis de l’humanité ne consentaient sans doute à laisser éclairer un moment leurs forfaits par la lueur des bibliothèques incendiées, que parce qu’ils espéraient que les ténèbres de l’ignorance n’en deviendraient que plus épaisses… Représentans du peuple, ce que l’assemblée constituante n’a pas fait, c’est à vous qu’il appartient de le faire ; nous avons pensé qu’il était impossible de laisser la constitution d’un grand peuple muette sur ce qui tient à l’enseignement. »

Passant alors aux mesures adoptées par la commission des onze, Boissy d’Anglas s’exprimait en ces termes :

« Nous vous proposerons d’examiner si les écoles primaires, telles que vous les avez adoptées, peuvent subsister sans modification, s’il n’est pas juste et politique d’en mettre la dépense à la charge des communes, et par conséquent à celle des citoyens qui ne semblent pas devoir profiter des immenses sacrifices que la nation fait à cet égard.

« Quatre-vingt-six écoles centrales nous ont paru beaucoup trop nombreuses ; en les réduisant de moitié, vous éviterez le danger d’appeler aux importantes fonctions de l’enseignement, la médiocrité parasite et ambitieuse qui se présente avec tant d’audace, et vous assurerez à tous ces établissemens toutes les ressources et tout l’éclat qu’ils peuvent obtenir de vos soins.

« Enfin nous vous proposons de créer un institut national qui puisse offrir, dans ses diverses parties, toutes les branches de l’enseignement public, et dans son ensemble, le plus haut degré de la science humaine ; il faut que tout ce que les hommes savent y soit enseigné dans la plus haute perfection ; il faut que tout homme y puisse apprendre à faire ce que tous les hommes de tous les pays, embrasés du feu du génie, ont fait et peuvent faire encore ; il faut