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Un mois après, le 9 septembre, les écoles militaires disparaissaient à leur tour et les corps administratifs étaient « expressément chargés de pourvoir au remplacement de ceux des instituteurs publics qui n’avaient pas constamment professé, depuis 1789, les principes de la révolution. » Enfin, le 15 septembre suivant, sur une pétition présentée par les autorités constituées du département de Paris et des districts ruraux, accompagnées de députations de la commune, des sections et des sociétés populaires, la convention décidait « qu’indépendamment des écoles primaires, il serait établi dans la république trois degrés progressifs d’instruction : le premier pour les connaissances indispensables aux artistes et ouvriers de tous les genres ; le second pour les connaissances ultérieures, nécessaires à ceux qui se destinent aux autres professions de la société ; le troisième pour les objets destruction dont l’étude difficile n’est pas à la portée de tous les hommes. » En conséquence, « les collèges de plein exercice et les facultés de théologie, de médecine et de droit étaient supprimés sur toute la surface de la république. » Ainsi finit, sur une impérieuse sommation de la foule, sans rapport et sans enquête préalable, sans même obtenir la suprême consolation d’un débat contradictoire et sans qu’une seule voix osât prendre sa défense, incidemment, misérablement, condamné par la rue, un régime qui, dans le cours de son existence six fois séculaire, avait formé tant et de si fortes générations et porté si loin la renommée de la culture et de l’esprit français : cette Université de Paris, mère de toutes les universités de France et d’Europe et longtemps la première par l’influence et l’autorité de son enseignement, encore plus que par son ancienneté ; ces universités provinciales qui entretenaient sur tant de points, avec le secours des sociétés savantes et des académies, une si remarquable intensité de vie intellectuelle ; ces collèges, enfin, si injustement décriés, qui pouvaient avoir des parties faibles, mais dont l’organisation, en somme, était si forte, la discipline si ferme et la méthode si sûre. C’en est fait de ce vaste ensemble, fruit de tant d’efforts individuels, de libéralités privées et d’obscurs dévoûmens, où chacun, princes, évêques, cités, corporations, avait apporté sa part ; les uns donnant leur obole, les autres leur expérience pédagogique et leurs vertus professionnelles. Toute cette barbarie va disparaître « et tomber sous la faux réformatrice[1]. » Qu’importe que le sol soit déjà jonché de ruines ? il faut que les ruines mêmes périssent, — etiam perie ruinœ, — qu’elles soient réduites en poussière afin

  1. Pétition du 15 septembre.