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de l’état : un amateur l’a acquis ! C’est le fait d’un esprit distingué et c’est d’un excellent exemple. Puisse la faveur du public s’attacher aux belles études de nos architectes et les gens de goût en venir un jour à se les disputer !

Nous touchons au terme de notre examen et nous sentons combien il est incomplet. Que d’ouvrages dignes d’éloges n’avons-nous point paru négliger ? D’abord les dessins exécutés par M. Nénot d’après le palais ducal de Venise et d’après le palais Pitti de Florence, qui sont d’un caractère si juste et d’un aspect si puissant ; puis les études de M. Viennois, sur le Palais de justice de Dijon ; et aussi la chapelle de la maison de répression de Nanterre, par M. Hermant. Cette chapelle, l’architecte, en la décorant au moyen de quelques couleurs, a su lui donner beaucoup d’expression : entourée qu’elle est des bâtimens sévères du pénitencier, elle console l’œil attristé. Elle met un rayon de lumière dans ce lieu sombre, comme font le repentir et l’espoir du pardon lorsqu’ils éclairent l’âme du prisonnier. Puis viennent l’hôtel-de-ville de La Ferté-sous-Jouarre, que construit M. Héneux ; une église de M. Chaîne ; un travail archéologique par lequel débute M. Morel-Révoil ; la série chronologique des maisons de Bruges, si bien présentée par M. Hügelin ; les décorations de M. Ouri et enfin plusieurs compositions parmi lesquelles il faut ranger les projets qui reviennent au Salon à la suite des concours publics.

Dans le nombre, on remarque les études en relief du concours ouvert A l’effet d’ériger à Versailles un monument commémoratif de l’assemblée nationale constituante de 1789. Nous leur devons, en terminant, une attention particulière. On sait quelles étaient les données du programme : le monument devait consister essentiellement en une colonne surmontée de la statue de la République ; il exigeait la coopération d’un architecte et d’un sculpteur. Le sujet nous semble avoir été parfaitement entendu par M. Formigé, qui s’est associé un statuaire de grand mérite, M. Coutan. Il a compris qu’un pareil ouvrage ne devait pas être de ceux qui servent de centre à la circulation et auprès desquels on passe sans avoir à s’arrêter. Il a eu l’idée d’entourer la colonne d’une enceinte formée par un mur que soutient extérieurement une ordonnance engagée. Cette enceinte représente la salle de l’assemblée avec ses gradins, le siège du président et la tribune. Enfin sur la muraille sont gravées les décisions de l’assemblée. Par sa nature et par l’intérêt qu’offrent ses dispositions, ce lieu vous arrête et vous retient ; il vous fait souvenir. La conception de M. Formigé est vraiment historique : aussi le prix a-t-il été décerné à ce jeune architecte et à son collaborateur, et cela était de toute justice. Certes, les autres projets avaient aussi leurs mérites. L’œuvre de