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qu’il a la certitude de pouvoir rendre intégralement. Du reste, il est facile de dresser en peu de mots le compte des avantages de l’opération du fermage par un exemple.

Le calcul est bien simple ; toutefois, pour l’établir, on sera forcé de s’en tenir aux chiures admis avant la crise actuelle, qui a apporté une grande perturbation dans les calculs et dans les appréciations.

Le fermier, non propriétaire, peut, avec 300,000 francs de fonds d’exploitation, cultiver 300 hectares, et tirer 15 pour 100 d’intérêt de son argent, soit 45,000 francs par an de bénéfice ; tandis que l’exploitant, propriétaire du sol, ne pourra avec pareille somme posséder et exploiter que 75 hectares.

L’acquisition ou la possession de ces 75 hectares, au prix de 3,000 francs l’un, absorbera 225,000 francs de capital immobilisé ne portant intérêt qu’à 2 1/2 pour 100 tout au plus ; ce qui donne un mince revenu annuel de 5,625 francs.

Il restera à l’exploitant 75,000 francs de capital d’exploitation ou de roulement qui lui rapporteront 15 pour 100 d’intérêt, soit un bénéfice de 11,250 francs par an.

De la sorte, l’opération du propriétaire cultivateur se résume ainsi :


Revenu foncier de la propriété 5, 625 fr.
Revenu de l’exploitation agricole 11,250 »
Total 16,875 fr.

Ainsi donc, le simple fermier tirera de ses 300,000 francs, 45,000 francs de revenu, tandis que l’exploitant ou fermier propriétaire ne tirera de cette même somme de 300,000 francs qu’un revenu annuel de 16,875 francs. L’écart dans les bénéfices est donc de 16 à 45.

Est-ce là ce que dans maints écrits l’on appelle ajouter aux bénéfices du fermage ceux de la propriété ?

Assurément il serait agréable de joindre à la possession de 300,0P0 francs de fonds d’exploitation la propriété de 300 hectares représentant 900,000 francs, ce qui constituerait une fortune de 1,200,000 francs ; mais là n’est pas la discussion. La difficulté du problème à résoudre en ce moment se trouve, non pas dans la division plus ou moins grande de la propriété, ou dans le mode d’exploitation, mais dans la quantité de capital qui sera consacrée à cette exploitation. Qui fournira le capital ? Sera-ce le propriétaire, qui a déjà immobilisé de grosses sommes dans la possession du sol, ou le fermier, dont le capital cultural est presque toujours insuffisant ? C’est pour le fermier ou pour le cultivateur