Page:Revue des Deux Mondes - 1881 - tome 45.djvu/397

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

une série de plateaux beaucoup moins élevés que le Djebel-Hogghar. Il y a peu d’années que le tracé de ces artères d’écoulement a commencé à figurer sur les cartes du Sahara. A la rigueur, on pouvait comprendre cette omission pour l’Igharghar et l’O.-Mia, qui, pour la majeure partie de leur cours, ne nous sont connus que par les renseignemens des indigènes ; mais le fait est plus étrange pour l’O.-Djédi, qui forme la véritable limite du massif algérien proprement dit, sur le cours duquel nous possédons les deux postes importans de Laghouat et de Biskra, et cependant jusque dans ces derniers temps le » cartes de l’état-major ont continué à l’indiquer par un trait ponctué, comme s’il s’agissait d’un affluent hypothétique du Zambèze ou du Congo.

L’ensemble de ces trois bassins occupant une superficie considérable de 8 à 10 degrés en tout sens, qu’on ne saurait estimer à moins de 100 millions d’hectares, est deux fois grand comme la France et comparable en surface au bassin du Danube. Tous ces lits de grandes rivières sont presque constamment à sec, sauf le cas des crues d’orage qui ont parfois un débit très considérable, mais dont les eaux, s’étalant à mesure sur d’immenses surfaces desséchées, atteignent rarement le bas-fond des cuvettes marécageuses où débouchent leurs vallées.

Dans les régions élevées des montagnes, vers le versant de l’Algérie et dans le massif des Hogghars, quelques affluens alimentés par des sources conservent un filet d’eau permanent pendant une certaine partie de l’année. Sur l’Igharghar un écoulement régulier se continue même, parait-il, jusqu’à Témassanin, à 200 kilomètres des sources les plus éloignées. Partout ailleurs les eaux ne tardent pas à s’infiltrer dans les graviers, où elles maintiennent leur lit souterrain, à moins qu’elles ne s’enfoncent dans des couches plus profondes, où elles constituent de véritables nappes artésiennes. Le plus souvent elles se maintiennent sous le sol sans issue apparente ; parfois, au contraire, elles reparaissent au jour, comme la nappe qui, après avoir absorbé les eaux de l’O.-Djédi à une vingtaine de kilomètres en amont de Laghouat, les ramènera la surface des sables vis-à-vis de cette oasis.

Malgré la faiblesse relative du débit de ses rivières desséchées, le Sahara est cependant.un des pays où les phénomènes géologiques dus à l’action des eaux courantes se manifestent de la manière la plus visible. Je ne parle pas des grands bouleversemens diluviens d’une époque géologique antérieure qui ont surtout donné au pays son relief actuel, caractérisé par de profondes érosions et dévastes dépôts de terrains quaternaires, mais des actions lentes et journalières qui se continuent de nos jours. Cette anomalie apparente s’explique par ce fait que les principales modifications de surface