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démocrates, et qu’il avait donné alors son adhésion à un programme qui proposait de rembourser toute la dette en papier et d’établir un impôt sur les rentes fédérales pour obliger les porteurs à accepter le remboursement. Après avoir énuméré les obstacles opposés pendant la dernière session à toute conversion nouvelle et les bills présentés pour multiplier sous toutes les formes et sous tous les prétextes les émissions de papier-monnaie, les auteurs de cette brochure entreprenaient de faire mesurer par des chiffres l’étendue du coup que le triomphe des démocrates et l’application de leurs doctrines économiques porteraient à la prospérité nationale. La substitution d’assignats aux billets que les banques nationales avaient émis pour une somme de 400 millions de dollars, et le remboursement en assignats de 700 millions de dollars de fonds publics, ajouteraient 1,100 millions de dollars à la masse flottante du papier-monnaie. Un pareil accroissement, opéré presque d’un seul coup, ne pouvait manquer d’entraîner une dépréciation immédiate du papier-monnaie et par contre-coup des fonds publics. Qui supporterait cette perte? D’abord les 4 millions de particuliers qui étaient devenus porteurs de rentes depuis qu’on avait créé les petites coupures et recouru au système des souscriptions publiques, ou qui étaient actionnaires des établissemens dont le capital et les réserves étaient placés en rentes, tels que les banques nationales, les banques d’état, les compagnies d’assurances, les caisses d’épargne et les associations de bienfaisance. Tous ces établissemens, dont les caisses sont le réservoir où le commerce et l’industrie viennent puiser, voyant leurs ressources atteintes et leur crédit ébranlé, seraient contraints par prudence de restreindre les crédits qu’ils avaient ouverts et de faire rentrer au moins en partie les avances qu’ils avaient consenties. Or ces avances ou ces ouvertures de crédit s’élevaient à un milliard de dollars pour les banques nationales, à 200 millions pour les banques d’état, à 420 millions pour les caisses d’épargne, à 65 millions pour les sociétés de crédit mutuel, à 200 millions pour les compagnies d’assurances, à 30 millions pour les seules compagnies d’assurances maritimes de New-York. C’étaient ces deux milliards de dollars mis à la disposition du commerce et de l’industrie qui avaient déterminé le merveilleux mouvement d’affaires dont les États-Unis étaient le théâtre et ramené la prospérité, le travail et l’aisance dans toutes les classes. Quel bouleversement ne serait pas jeté dans les affaires par un soudain et inévitable resserrement du crédit?

Lorsque la foi publique aurait été violée, lorsque le paiement en papier aurait été substitué au paiement en or garanti par des engagemens solennels de la part du congrès, les porteurs étrangers.