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les mers de Chine jusqu’à vingt de leurs vaisseaux de guerre et des troupes de débarquement. Par un mouvement dont on comprendra la dignité, ils firent savoir aux ministres chinois que, si la sentence rendue contre Chung-How était exécutée, une guerre immédiate entre les deux empires serait la conséquence de cette exécution.

La Chine, malgré l’imperfection de son organisation militaire, la vénalité de plusieurs de ses généraux qui font à l’instar de notre dernier empire figurer sur le papier des bataillons qui n’existent pas, n’est pas une puissance tout à fait à dédaigner. On croit que son armée est de 602,000 hommes, dont 87,000 de cavalerie, 195,000 d’infanterie, dite de campagne, et 320,000 n’ayant d’autre mission que celle de garder les grandes villes et places frontières. Peut-être que la moitié seule de ces forces pourrait entrer en campagne, attendu que, l’armée chinoise étant dispersée sur une superficie de A millions de kilomètres carrés, il serait impossible, faute de chemins de fer et de grandes voies, de réunir beaucoup de soldats sur un seul point. Les mêmes difficultés existent, il est vrai, pour les Russes, et il en coûterait cher à leur trésor si une armée de 50,000 hommes avait pour mission d’envahir la Chine par le Kouldja.

Les fortifications qui défendent l’approche des ports chinois sont munies généralement de canons Krupp. Les torpilles et la manière de s’en servir sans danger ne sont pas non plus inconnues à la Chine. Elle a des arsenaux peu nombreux, il est vrai, mais ceux qu’elle a sont presque tous dirigés par des Européens. Celui de Shanghaï a été créé il y a déjà treize ans; on s’y occupe de constructions navales, de fabrication d’armes portatives et de projectiles. Il s’y trouve une poudrerie qui peut fabriquer par mois 20,000 livres de matières explosibles. A Tien-Tsin, il y a aussi des poudreries, et l’on y confectionne également des armes, des cartouches métalliques, des projectiles de forte dimension, de l’artillerie de côte, et des fusils Remington. L’arsenal de Fou-tcheou n’est destiné qu’aux constructions navales; il est admirablement organisé à la française.

Enfin l’arsenal de Canton est remarquable par de bons ateliers d’où sortent des canons Gatling. et des armes portatives gigantesques, destinées plutôt à produire sur l’ennemi une impression morale désagréable qu’à lui faire beaucoup de mal. Il est même nécessaire de constater à ce propos que l’on voit encore en Chine, bien plus qu’on ne le suppose, des soldats armés d’arcs, de flèches, de boucliers sur lesquels sont peints des monstres effroyables à voir. Beaucoup de Braves, — et c’est le plus grand nombre, — ont toujours