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les écoliers, soit dans une foule de petits avantages variables suivant les localités et néanmoins fort appréciables.

À dire vrai, la rétribution scolaire était loin d’exister partout. Dans les collèges des jésuites, notamment, les classes étaient ouvertes à tous les enfans que les familles jugeaient à propos d’y envoyer sans qu’elles eussent à payer aucuns frais d’études. Il en était ou il en fut de même à Paris : au collège des Quatre-Nations, en vertu des lettres patentes qui servaient de règlement à la fondation du cardinal Mazarin et dans les autres collèges à partir de 1719. On sait qu’à cette époque, grâce à l’intelligente libéralité du régent, qui consentit à ce que le produit des messageries royales fût joint à celui des messageries de l’université, l’instruction devint entièrement gratuite dans tous les établissemens de plein exercice dépendant de la faculté des arts. Les émolumens fixes des professeurs de philosophie et de rhétorique furent alors portés à 1,000 livres, ceux des professeurs de seconde et de troisième à 800 livres, ceux des professeurs de quatrième, cinquième et sixième à 600 liv., leur éventuel à peu près au même chiffre. En 1783, il était de l,400, 1,200 et 1,000 livres. Ces sommes nous paraissent bien faibles aujourd’hui ; dans le moment, il ne paraît pas qu’elles aient été jugées insuffisantes. En effet, l’école de Paris accueillit avec un véritable enthousiasme la publication de l’édit qui instituait la gratuité. « Il semblait, a dit son historien[1], qu’elle fût appelés à une nouvelle vie et que Louis XV, ou plutôt le duc d’Orléans, fût son second fondateur. Par mandement du recteur un Te Deum fut chanté dans les collèges et deux jours de congé accordés aux élèves. L’université en corps alla remercier le roi, le régent, le garde des sceaux. Et Coffin, heureux de servir d’interprète aux sentimens de ses collègues, exprima en termes bien sentis les motifs de leur reconnaissance. « Vous avez compris, monseigneur, dit-il au régent, que l’éducation de la jeunesse est le premier et le plus solide fondement de la gloire et de la félicité des états ; que l’honneur et la liberté sont l’âme des lettres, que pour servir plus utilement le public dans nos professions il faut être indépendant… C’est par des vues si nobles et si élevées, monseigneur, que vous avez formé le dessein de l’instruction gratuite dans l’Université de Paris et que vous en avez avancé l’exécution avec un empressement qui pourrait faire douter si vous avez eu plus de joie en nous accordant cette faveur que nous en la recevant. »

Que ce langage fût celui de gens aigris et mécontens de leur sort, il serait difficile de le soutenir. On aurait aussi quelque peine

  1. Jourdain.