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On était parvenu à vaincre les principaux obstacles, les questions les plus épineuses étaient résolues, on travaillait à n’en laisser aucune indécise. L’Allemagne allait recevoir une constitution fédérale, qu’elle attendait des délibérations du congrès, ce qui aurait arrêté la tendance que l’on y observe dans les opinions, à se former en ligue du Midi et en ligue du Nord. Les puissances allaient opposer en Italie, par des arrangemens justes et sages, une barrière efficace au retour de ces révolutions fréquentes dont les peuples de ce pays sont tourmentés depuis des siècles. On s’occupait des mesures bienfaisantes par lesquelles les intérêts réciproques des différens pays eussent été assurés, leurs points de contact et leurs rapports d’industrie et de commerce multipliés, toutes les communications utiles perfectionnées et facilitées d’après les principes d’une politique libérale.

Nous nous flattions enfin que le congrès couronnerait ses travaux en substituant à ces alliances passagères, fruits des besoins et des calculs momentanés, un système permanent de garantie commune et d’équilibre général, dont nous avions fait apprécier les avantages par toutes les puissances. Lord Castlereagh avait, dans cette idée, fait rédiger un très bon article. L’empire ottoman entrait dans la grande préservation, et peut-être l’information que l’Angleterre et nous lui en avons donnée a-t-elle contribué à le déterminer à repousser toutes les insinuations que Buonaparte avait essayé de lui faire. Ainsi, l’ordre établi en Europe eût été placé sous la protection constante de toutes les parties intéressées, qui, par des démarches sagement concertées, ou par des efforts sincèrement réunis, eussent étouffé, dès sa naissance, toute tentative faite pour le compromettre.

Alors les révolutions se seraient trouvées arrêtées, les gouvernemens auraient pu consacrer leurs soins à l’administration intérieure, à des améliorations réelles, conformes aux besoins et aux vœux des peuples, et à l’exécution de tant de plans salutaires que les dangers et les convulsions des temps passés les avaient malheureusement forcés de suspendre.

C’était le rétablissement du gouvernement de Votre Majesté, dont les intérêts, les principes et les vœux se dirigeaient tous vers la conservation de la paix, qui avait mis l’Europe en état de donner une base solide à sa tranquillité et à son bonheur à venir. Le maintien de Votre Majesté sur son trône était nécessaire à l’achèvement de ce grand ouvrage. La terrible catastrophe qui l’a, pour quelque temps, séparée de ses peuples, est venue l’interrompre. Il a fallu