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et du Sénégal avec l’intérieur du Soudan » se réunit pour la première fois le 21 juillet 1879, et ses séances se prolongèrent jusqu’à la fin du mois d’octobre suivant. M. de Freycinet l’avait composée de tous les hommes capables d’apporter quelque lumière sur les points à traiter : voyageurs ayant exploré le Sahara, officiers ayant commandé dans le sud de l’Algérie, savans ayant étudié la nature du désert, ingénieurs experts dans lest travaux projetés, sénateurs et députés des départemens algériens, membres du parlement s’occupant d’une façon particulière de notre colonie. On ne pouvait rêver assemblée plus compétente, et cependant, malgré l’intérêt que présentèrent les discussions, elles ne servirent qu’à faire éclater la divergence des vues. Précisément parce qu’il était familier avec la question, chaque membre arrivait avec une opinion toute faite, des idées fixes. Les uns raisonnaient d’après leurs sympathies pour les régions qu’ils avaient parcourues, les autres subissaient l’influence des traditions indigènes qu’ils avaient étudiées ; ceux-ci prétendaient arrêter la voie à Ouargla, la faisant ainsi aboutir au néant du désert, ceux-là demandaient qu’on ouvrît immédiatement des chantiers, alors que personne ne sait encore d’où la ligne partira et où elle ira ; deux sous-commissions prenaient sur le même sujet, des résolutions absolument différentes ; les représentans de l’Algérie parlaient chacun pour leur province ; et les militaires et les civils se témoignaient une défiance qui était comme un écho lointain de l’inimitié quilles divise dans notre colonie africaine. Ni sur le point de départ, ni sur la direction générale, ni sur le point d’arrivée de la ligne, ni sur la façon de procéder aux études, il ne fut possible d’arriver à une entente. Les provinces algériennes réclamaient toutes : les trois l’avantages d’être prises pour tête de ligne, ce qui obligeait à choisir entre trois points de départ ; comme but à atteindre, les uns proposaient le Niger et les autres le Haoussa, ce qui obligeait encore à choisir entre deux points d’arrivée ; enfin, il y avait deux systèmes en présence pour les explorations dans le désert, celui des voyageurs isolés et celui des voyageurs escortés. Pour ne mécontenter personne, tout choix fut remis jusqu’à plus ample informé. On décida que les divers tracés seraient simultanément étudiés et que les deux systèmes d’exploration seraient employés concurremment. Disons tout de suite à ce propos que M. Soleillet, qui s’était fait connaître par deux voyages à In-Salah et à Segou et qui s’était offert pour voyager isolément, a échoué deux fois dans son projet d’aller de Saint-Louis du Sénégal à Alger, en passant par Tombouctou. Il tente actuellement cette entreprise pour la troisième fois.

Sur la proposition de la commission, le ministre des travaux