Page:Revue des Deux Mondes - 1881 - tome 43.djvu/679

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’août devant la barre pour retarder le plus possible la prise de la ville par l’ennemi, qui devenait de plus en plus nombreux depuis le dernier échec des Autrichiens. Deux cent cinquante de ces derniers avaient en effet été entièrement détruits à Tlapacoyan par les libéraux. Plusieurs personnes venant de Papantla à Tuspan avaient vu ramener à Papantla quarante prisonniers autrichiens sous bonne escorte. Trente soldats eussent suffi avec ce qu’il y avait de troupes mexicaines pour défendre la ville, mais il les fallait si on ne voulait perdre Tuspan, ce qui eût été un grand échec, car il eût été très difficile de le reprendre. La barre, en effet, qui a 14 pieds l’hiver, n’en avait plus que 6, et ce n’est pas avec des canots qu’on eût repris les cerros de l’Hôpital et de la Cruz. Le stationnaire parti, Tuspan n’avait plus huit jours à tenir. La situation était malheureusement si claire que, dans quelques pourparlers tenus avec Papantla, Lazaro Mufios, un des habitans les plus influens, avait répondu : « Je ne veux pas me déshonorer en reconnaissant le gouvernement intrus de l’empereur. Le jour du triomphe est proche, et j’en crois la défaite des Autrichiens et nos succès récens. »

Du côté de Tampico, la plupart des routes qui conduisaient vers l’intérieur avaient été interceptées dès le mois de mai. Le commandant supérieur Vollée, qui avait succédé au colonel du Pin, avait voulu réunir son monde pour marcher sur Santa-Barbara, peut-être même sur Victoria. Il avait demandé au commandant Cloué une compagnie de débarquement pour garder Tampico. Mais les ordres du ministre étaient formels pour ne point laisser, à moins d’absolue nécessité, des matelots à terre, et d’ailleurs le maréchal n’avait point approuvé les projets de M. Vollée. Deux bataillons, celui de la légion étrangère du commandant Bryan, que la marine avait porté à Matamoros au mois de mai et qui, dirigé sur Tampico, était maintenant campé de l’autre côté de la rivière, à Tampico-Alto, à une assez grande distance de la ville, et celui du commandant Chopin, qui avait poussé une pointe à 40 lieues de distance, à Tancasnequi, n’étaient pas en état, par les maladies qui les affaiblissaient et la difficulté des chemins, de revenir assez tôt pour défendre la ville. Aussi la population impérialiste de Tampico avait la plus grande peur de l’ennemi. Celui-ci pourtant, qui aurait craint à son tour d’être coupé, n’eût sans doute pas occupé Tampico, mais l’eût, tout au moins, rançonné et pillé. L’état du bataillon de Bryan devint bientôt si alarmant que le Tarn reçut l’ordre de le ramener à Vera-Cruz en le remplaçant par le dépôt de bataillon d’Afrique. Quant au bataillon Chopin, s’il était besoin de communiquer avec lui, le commandant du Tarn devait remonter la