Page:Revue des Deux Mondes - 1881 - tome 43.djvu/419

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LA
REFORME JUDICIAIRE

III.[1]
L’ESPRIT DE RÉFORME ET L’ESPRIT RÉVOLUTIONNAIRE.

Le tableau des épreuves que la magistrature a traversées depuis 1789, et la vue des transformations que la démocratie a fait subir aux corps des juges dans les deux républiques fédérales, nous ont préparés à comprendre les attaques dont notre organisation judiciaire est aujourd’hui l’objet.

L’esprit révolutionnaire veut détruire de fond en comble l’organisation créée sous le consulat et faire naître d’un coup de baguette un système où tout sera nouveau, hommes et institutions. La routine répond en déclarant que nos juridictions, le mécanisme de la justice, l’œuvre et le personnel sont au-dessus de tout éloge, que la haine et l’aveuglement peuvent seuls inspirer des attaques contre nos corps judiciaires. L’esprit de réforme écoute toutes les critiques, les pèse à leur valeur, les rejette ou les admet suivant la force de leurs preuves, tient grand compte du passé, ne le prend pas pour seul juge, ne méprise aucune plainte, ne refuse aucun conseil, fait l’enquête, la plus sincère, ne part pas d’un système préconçu, mais aboutit à ce que la raison suggère ; en un mot, il veut le progrès sans secousse, le recherche en ne se lassant point, en se préoccupant beaucoup des besoins publics, sans s’effrayer des clameurs, mais en prêtant l’oreille à toutes les doléances d’où qu’elles viennent.

  1. Voyez la Revue du 1er décembre 1880 et du 1er janvier 1881.