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des égyptiens, l’armée s’étant fait-une loi de ne jamais avoir d’autres soldats ou employés dans les terres chaudes.

Opposer ces fins de non-recevoir, dire ces vérités était fort délicat. Quand on est loin des obstacles, on aime à vivre dans la douce persuasion que les obstacles ne subsistent plus, ou vont s’amoindrissant, et ceux qui souffrent ou sont gênés ont toujours quelque tort de venir importuner la quiétude d’un gouvernement ou d’une administration de leurs ennuis ou de leurs souffrances. A la guerre comme dans la vie ordinaire, si l’on dépend de quelqu’un, il faut que, aux yeux de ce quelqu’un, tout aille bien ou le mieux possible. Dans de pareilles circonstances, le chef d’une expédition ou d’une station lointaine doit être franc, mais doit surtout savoir l’être. C’est un art, et il n’y réussit peut-être bien que si l’énergie du caractère el l’honnêteté de cœur sont à la hauteur du sentiment qu’il a très juste de sa position fausse. Il s’agit de ne pas déplaire, il faut encore moins s’exposer à passer pour insuffisant, et pourtant on a le devoir de sauvegarder d’une manière absolue, en même temps que les exigences du service, la vie et le bien-être de ceux qui nous entourent.

Toutefois la marine avait, pour traverser ces momens difficiles, un intermédiaire très puissant, très bienveillant dans le maréchal, qui, mieux que personne, pouvait savoir à quel point toute réforme trop hâtive, dans le sens pacifique, était inopportune. Ce fut à lui que le commandant Cloué s’adressa pour satisfaire tout d’abord dans une certaine mesure aux prescriptions des dépêches. Il le pria de vouloir bien retirer les prisonniers de Saint-Jean-d’Ulloa. Il fit valoir, ce qui était exact, que le fort était à ce point encombré de personnel et surtout d’un personnel hideux, qu’aux prochaines chaleurs on devait s’attendre à une épidémie de typhus. Sa demande fut accueillie, et, de ce côté, le personnel destiné à garder le fort put être diminué. C’était déjà obtenir, par un commencement d’exécution des ordres reçus, que le personnel de la direction du port ne fût réduit que plus tard. Il était aisé de faire justice de l’ambulance de Sacrificios en envoyant une épreuve de la cabane. La photographie est brutale, mais elle a le mérite d’être sans réplique. Quant à l’hôpital de la marine, le commandant déclina une responsabilité aussi grande que celle de sa suppression complète. Il n’était possible que d’essayer de le réduire et il fallait désirer qu’il n’en résultât pas d’inconvénient grave. Toutefois si, à ce sujet, de nouveaux ordres arrivaient qui fussent impératifs, le premier transport, quoi qu’il pût en advenir, emporterait d’un seul coup le personnel de santé et le matériel. La marine n’aurait plus d’hôpital à Vera-Cruz. Après des observations soumises à l’autorité, l’annonce, sinon la