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hostilités chancelaient un peu en face des événemens, elles persistaient à Paris dans leur plénitude. On y croyait à une émigration solide des Français de New-York venus à la, Martinique pour le Mexique, tandis que ce n’était qu’une troupe de pauvres diables. la plupart doreurs, bijoutiers et lapidaires, qui ne trouvaient pas même à se placer et que, plutôt que de les laisser mourir de faim sur le pavé de la Vera-Cruz, on nourrissait à la ration à bord de l’Allier. De plus, les dépêches ministérielles, stimulées du reste par les retranchemens faits au budget, prescrivaient de diminuer l’effectif du personnel du port, comme n’étant plus en rapport avec le calme dont on jouissait, et la suppression de l’hôpital de la marine, qui, présumait-on, ne devait plus avoir à l’avenir qu’un nombre insignifiant de malades.

Tout cela était plus que difficile à faire. Les réductions ordonnées ramenaient à deux cents hommes l’effectif de la direction du port, et il devenait dès lors matériellement impossible de suffire au service d’embarquement et de débarquement et de transporter les effets de campement du quai jusqu’en ville. Au fort, il y avait à garder nos magasins et à surveiller la tourbe remuante et malsaine des prisonniers français et mexicains. La suppression de l’hôpital de la marine était très dangereuse, car on n’avait évité les épidémies qu’en y envoyant les malades du bord.

Malheureusement les dépêches, quelque peu empreintes d’un optimisme de parti-pris et se fondant sur des renseignemens erronés, prévoyaient une partie de ces objections. Il n’y avait, selon elles, qu’à envoyer les malades à l’hôpital de la guerre, ou, à défaut de cet hôpital, à l’ambulance du fort ou à celle de Sacrificios. Il n’est pas rare que, lorsqu’un établissement se fait, si mince qu’il soit, ses fondateurs, dans quelque contentement d’eux-mêmes et pour recueillir des éloges, s’en exagèrent et en exagèrent aux autres les proportions et l’importance. Or, sans parler de l’ambulance du fort, qui était très petite, dans une casemate et des conditions déplorables, celle de Sacrificios n’était bonne au plus que pour quatre ou cinq hommes. Elle ne consistait que dans une cabane assez bien établie, que de précédens rapports avaient sans doute transformée en palais sanitaire. Voilà pourquoi on l’indiquait si complaisamment de Paris. Enfin prétendu hôpital de la guerre venait d’être transporté à Paseo del Macho avec un seul médecin. D’ailleurs il n’avait jamais été un hôpital, mais une ambulance dans un local malsain quoique vaste, parce que, faute de moyens de l’entretenir, il avait toujours été sale. Le genre de ses malades y avait contribué ; on n’y soignait que des contre-guérilleros mexicains ou