Page:Revue des Deux Mondes - 1880 - tome 42.djvu/680

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le pays, dit-il, est le type du terrain plat et couvert. Les pluies de l’hivernage y laissent des mares qui durent de six semaines à deux mois, suivant leur profondeur. Passé ce délai, les voyages deviennent impossibles. Bien qu’il eût emmené une vingtaine de chameaux pour le transport de ses provisions, M. Monteil faillit périr de soif, car il resta onze jours sans trouver de l’eau. Déjà sa caravane se croyait perdue, lorsqu’un spahis aperçut la surface d’une mare bleuissant à travers le feuillage. Au-delà de ce désert, on entre dans le Ferlo proprement dit, dont les habitans percent l’épaisse couche argileuse pour creuser des puits de 45 à 50 mètres de profondeur. Peu à peu la poussière et les éboulemens en oblitèrent le goulot inférieur, et le curage est si périlleux que les gens préfèrent aller creuser un nouveau puits plus loin, de sorte que les villages se déplacent sans cesse. Le désert lui-même était autrefois peuplé et a été ainsi abandonné. La population est de trois mille cinq cents à quatre mille âmes pendant la saison sèche ; mais pendant la saison des pluies, ce chiffre s’élève à six mille, parce que les pasteurs remontent des bords du Sénégal avec leurs troupeaux. Ces troupeaux sont nombreux et le sol est fertile en mil et en maïs, mais avec une si faible population ce qu’il peut produire est peu de chose. En somme, l’avantage d’être plus court que le tracé de la vallée du Sénégal ne compense point suffisamment pour le tracé du Ferlo la pauvreté du pays traversé et l’absence complète de matériaux de construction, Il est définitivement écarté.

Le cours du Sénégal entre Bakel et Médine a dû être relevé au mois d’avril dernier par le lieutenant Pol, Nous sommes assurés des dispositions pacifiques des populations du Guoye et du Ramera, qui ne s’enrichissent dans le commerce que grâce à, la sécurité que nous maintenons sur le fleuve. Là commence la série des plateaux successifs par lesquels le terrain s’élève jusqu’au faîte de partage des eaux entre le Sénégal et le Niger. Le pays devient montagneux.


III

Au-delà de Médine, on sort des limites du territoire sur lequel s’était jusqu’à l’année dernière exercée notre influence. Dans nos rapports avec les indigènes, nous avions constamment affirmé nos prétentions sur la rive gauche. du Sénégal jusqu’à Bafoulabé ; mais nous ne les avions jamais appuyées d’aucune démonstration effective. Dès qu’il fut question de nous diriger vers le Soudan, tous les efforts de M. Brière de l’Isle tendirent à exercer ces droits si soigneusement réservés. Le crédit de 50. 0,000 francs fut à peu près tout entier employé dans le haut fleuve ; les nécessités de l’entreprise obligèrent même & anticiper de 300,000 francs sur celui