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en 1818 de Dwarka-Nath-Tagore, l’ami de Ram-Mohun-Roy, appartenait au clan brahmane des Piralis. À peine âgé de vingt ans, il avait fondé une « association pour la recherche de la vérité, » Tattva-Bodhiny-Sabha, qui se proposait « l’introduction graduelle, parmi les populations indigènes, du culte monothéiste originairement inculqué dans les Écritures hindoues. » L’association se réunissait chaque semaine dans la maison des Nath-Tagore, pour y discuter des questions religieuses ; une fois par mois, elle y célébrait un service divin où l’on chantait des hymnes et où l’on lisait des textes des Oupanishads. Elle avait même commencé à former des missionnaires pour prêcher dans toute l’Inde la réforme du culte national, lorsqu’en 1843 elle entra en corps dans le Brahma Somaj, à la suite de Debendra. Elle y apportait, avec ses ressources pécuniaires, ses habitudes d’activité intellectuelle, et bientôt, grâce à cet élément nouveau, l’œuvre de Mohun-Roy reprit sa marche ascendante. Cependant, en 1847, les brahmaïstes pratiquans n’étaient pas même un millier. Alors éclata une crise qui semblait présager leur dispersion, mais qui devint au contraire le principal fondement de leur rapide fortune parmi les classes éclairées du pays.

Ram-Mohun-Roy avait compris dans son organisation religieuse tous ceux qui admettaient l’unité de Dieu, sous cette seule restriction de ne conserver aucune affinité avec des doctrines et des pratiques polythéistes. Toutefois, en fait, le Brahma Somaj était une simple secte de l’hindouisme, puisqu’il s’en tenait à la philosophie orthodoxe du Védanta et que, par suite, il admettait l’infaillibilité des Védas. Les prières et les hymnes qui composaient toute sa liturgie étaient profondément empreints de l’esprit védantique, qui s’y traduisait en continuelles allusions aux dogmes de la métempsycose et de l’identification avec l’essence divine. Or rien n’était plus contraire aux tendances de Debendra-Nath-Tagore et de ses amis, qui, — peut-être sous l’influence d’une éducation plus européenne, — en étaient arrivés à la conception d’un Dieu distinct et personnel. Les nouveaux venus, qui avaient rapidement conquis la prééminence dans le Brahma Somaj, cherchèrent d’abord dans les Védas mêmes la confirmation de leurs vues. On a dit que tout pouvait se trouver dans la Bible ; cette assertion s’appliquerait bien mieux encore aux Védas. Les Védas, — ou plutôt le Véda, c’est-à-dire la Science, — sont réputés, dans la théologie brahmane, le souffle même de Dieu, communiqué aux richis, — les bardes de la migration aryenne, — et transmis par eux, de bouche en bouche, jusqu’au jour où les brahmanes, leurs légitimes héritiers, jugèrent opportun de fixer par écrit les formules de la révélation divine. En réalité, les Védas forment une innombrable collection de liturgies et de traités théologiques, composés par des auteurs généralement