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Fleuve-Rouge est gênée par de nombreux bancs de sables mouvans qui se déplacent tour à tour chaque année. L’hydrographie complète du delta, faite en ces derniers temps par MM. Bouillet et Héraud, en fera connaître les principales difficultés.

Nous avons créé sur le Cam, autre branche du Fleuve-Rouge, un établissement peu considérable qui porte le nom de Haï-Phong. Ce poste, placé au milieu de marécages, n’est appelé à avoir une réelle importance qu’au point de vue militaire. C’est, en effet, le seul port du Tonkin où les navires de guerre puissent trouver une profondeur suffisante pour pénétrer dans l’intérieur. Il y a dans ce port de Haï-Phong, qui n’a été ouvert au commerce européen qu’à la suite de notre traité avec Tu-Duc, un consul, une douane, des soldats de notre infanterie de marine et une escadrille de canonnières chargée de faire la police des divers bras du Fleuve-Rouge, mais à leurs embouchures seulement.

Dès que notre installation y fut définitive, les Anglais, toujours entreprenans, établirent un service à peu près régulier de bateaux à vapeur entre Haï-Phong et Hong-kong. Il va s’en créer un nouveau de Saïgon à Haï-Phong également. Du 15 septembre 1873 jusqu’au 15 juin 1876, la valeur des marchandises importées s’est élevée à 3 millions de francs. Elles consistent principalement en soieries de Chine, en cotonnades anglaises et médecines diverses. L’exportation est insignifiante, — la sortie du riz étant défendue par le roi Tu-Duc pour empêcher les bâtimens de commerce d’approcher de ses états. Elle s’est cependant élevée, pendant la période que nous avons citée, à 258,000 taëls, soit environ 2 millions de francs. L’étain, le vernis à laques, des huiles à vernir, des cotons égrenés sont les objets qui s’exportent le plus. Que le trafic devienne libre de la mer du Yunnan, que la France s’empare du Tonkin, et ce sera par des centaines de millions que se chiffreront tous les ans les transactions entre les deux pays.

Disons, avant de quitter le Fleuve-Rouge, que sa partie navigable compte environ 414 milles, divisés ainsi par M. Dupuis : de la mer à Hannoï par le Cua-Loc, 110 milles ; d’Hannoï à Kouen-ce, poste avancé annamite, 119 ; de Kouen-ce à Lao-kaï, à travers les forêts, 115 ; de Lao-kaï à Mang-hao, 70.


VI

Nous sommes loin de nous faire illusion ; ce n’est pas sans avoir hésité beaucoup que le gouvernement français va sans doute se décidera intervenir au Tonkin. Il suffisait du reste que les ministres de la marine qui ont précédé le ministre actuel aient été