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pas délégués par leurs collègues dans le parlement du royaume-uni ? Seraient-ils exclus tout à la fois de la chambre des lords et de la chambre des communes ? C’est la situation dans laquelle se trouvent les pairs écossais depuis l’acte d’union de 1707. Ceux qui ne sont pas choisis par leurs collègues pour les représenter dans la chambre des lords se trouvent bannis de la vie politique, à moins que la couronne ne crée en leur faveur une pairie anglaise, ce qui ne peut se faire que dans des cas tout à fait exceptionnels. La pratique ayant montré les inconvéniens et l’injustice de ce système, on établit que les pairs irlandais auraient le droit de se faire élire députés, mais en Angleterre seulement. C’est grâce à cette disposition que lord Palmerston, pair d’Irlande, a pu siéger dans la chambre des communes.

L’opposition irlandaise, malgré la certitude de sa défaite finale, disputa pied à pied le terrain au gouvernement. Grattan et Ponsonby, dans cette occasion, marchaient complètement d’accord. Jamais débat ne passionna davantage le parlement irlandais, à la veille de disparaître. A la suite d’une séance plus orageuse que les autres, Grattan et Corry allèrent sur le terrain et échangèrent deux balles. Enfin, après une lutte acharnée, qui ne dura pas moins de quinze jours, les résolutions proposées par le gouvernement furent votées. Il ne restait plus qu’à les faire accepter par le parlement anglais. Là on était encore plus sûr de la majorité. L’opposition, depuis plusieurs années, était presque réduite à néant. Fox, attristé et découragé, ne parut même pas à la chambre des communes pour protester contre la mesure. Sheridan, Tierney, Grey, prirent la parole. Au vote ils ne réunirent que trente adhérens. Dans la chambre des lords trois voix seulement se prononcèrent contre le gouvernement. La question était tranchée. Les résolutions votées par les deux parlemens furent transformées en un bill, auquel la couronne donna son assentiment le 2 juillet. L’acte d’union était devenu une loi de l’état. Le parlement anglais et le parlement irlandais avaient vécu. Le parlement du royaume-uni allait s’assembler pour la première fois au commencement de 1801.

Ainsi disparut le dernier vestige d’indépendance de la malheureuse Irlande. L’historien, l’homme politique, ne peuvent assurément blâmer la suppression du parlement de Dublin. Le système de l’union personnelle et de la séparation législative entre deux états présente de tels inconvéniens qu’il est à peine nécessaire de les faire ressortir. La réforme entreprise par Pitt était donc sage. Il faut seulement regretter qu’elle ait été accomplie par des moyens auxquels la morale ne saurait donner sa complète approbation. Ajoutons qu’il a rarement existé une assemblée politique moins respectable que le parlement irlandais. La corruption et la violence