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son fils unique, Richard, sur lequel il fondait de grandes espérances, bientôt déçues par une mort prématurée. Burke s’étant déjà prononcé avec éclat contre les principes de la révolution, son nom était une réponse à ceux qui auraient été disposés à considérer la cause des catholiques irlandais comme solidaire de celle des révolutionnaires français.

Encouragé par une adhésion si importante, sir Hercule Langrishe présenta au parlement irlandais, dans le cours de cette même année 1792, un bill en faveur des catholiques. La réforme proposée était bien modeste. Elle n’accordait pas aux catholiques le droit électoral ; elle le maintenait seulement aux protestans qui épousaient des catholiques, à la condition que le mariage fût célébré par un ministre anglican. Elle permettait d’ouvrir des écoles sans l’autorisation de l’évêque. Elle abolissait, en outre, quelques dispositions législatives véritablement exorbitantes. Si timide que fût cette proposition, elle rencontra des adversaires, et elle n’aurait peut-être pas passé sans l’appui que lui donna le gouvernement. Le lord-lieutenant ou vice-roi d’Irlande, lord Westmoreland, était complètement acquis aux vieilles maximes d’intolérance, ainsi que l’un de ses deux principaux collaborateurs, le chancelier John Fitzgibbon. Le secrétaire principal pour l’Irlande, M. Hobart, avait heureusement des idées plus larges. D’ailleurs les instructions de Pitt étaient formelles. M. Hobart, au nom du gouvernement, se prononça en faveur du bill.

L’année suivante, ce fut le gouvernement qui prit l’initiative d’une nouvelle réforme. M. Hobart présenta au parlement irlandais un bill beaucoup plus important que celui de sir Hercule Langrishe. La proposition Hobart établissait la liberté d’enseignement, si précieuse pour les catholiques ; elle les faisait électeurs, mais non pas encore éligibles ; enfin elle les admettait à un certain nombre d’emplois civils et militaires, les moins importans, il est vrai. Ce n’était pas tout ce qu’on réclamait ; toutefois c’était déjà un sérieux progrès. Aussi la résistance du parti protestant fut-elle extrêmement vive. Fitzgibbon protesta énergiquement auprès du gouvernement central. On ne tint pas compte de ses réclamations, et il fut obligé, comme chancelier, d’apposer sûr la nouvelle loi le sceau de la couronne d’Irlande.

Les catholiques venaient donc d’obtenir, coup sur coup, deux succès qui auraient dû les encourager à persévérer dans la voie légale. Malheureusement les nouvelles qui arrivaient de France, en surexcitant leurs espérances, leur enlevaient la sagesse qui leur aurait été si nécessaire. Déjà la direction du comité de Dublin échappait aux modérés pour passer aux mains des violens. Richard