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IV

Voilà quelles sont les principales réformes que le nouveau plan d’études introduit dans nos écoles. Il nous reste à chercher, en finissant, si l’on peut en prévoir les conséquences, et ce qu’il y a de fondé dans les plaintes des gens qui affectent de les déplorer et dans les éloges de ceux qui les portent aux nues.

Nous pouvons affirmer d’abord, avant tout examen, que ces éloges comme ces plaintes doivent être fort exagérés. On met aujourd’hui une passion singulière à discuter toutes les questions qui touchent à l’enseignement. Elles ont le privilège d’exciter même les gens sages, de faire sortir les meilleurs esprits de leur rectitude ordinaire, et comme nous sommes naturellement intolérans et que nous aimons à prononcer des anathèmes, nous nous excommunions les uns les autres à propos des vers latins et des langues vivantes. C’est beaucoup de bruit pour peu de chose. En réalité, les méthodes ne font jamais tout le bien ou tout le mal qu’on en attend. Pour prévoir ou expliquer leur succès, il faut tenir grand compte des circonstances au milieu desquelles elles naissent et des dispositions de ceux qui sont chargés de les pratiquer. Il en est d’elles comme des remèdes, qui n’ont qu’un temps pour guérir : lorsqu’elles sont nouvelles et acceptées par l’opinion, il y a une sorte d’accord général et de bonne volonté commune qui les font réussir. On peut dire qu’il n’y en a point qui soient absolument bonnes, car les meilleures et les plus raisonnables ne conviennent pas à toutes les époques et n’ont pas de prise sur tous les esprits. Il n’y en a pas non plus d’absolument mauvaises, et celles dont on ne tire pas un profit direct servent toujours à quelques-uns par l’effort même qu’elles demandent. Il faut donc être très convaincu, quand on s’occupe de l’éducation de la jeunesse, qu’elle peut se faire de beaucoup de façons et qu’on arrive au but par des routes très diverses.

Il est certain pourtant que quelques-uns de ces chemins sont plus directs et plus courts que les autres, et qu’il est sage de les préférer. Si l’on peut à la rigueur réussir avec toutes les méthodes, il faut se décider pour celles où le succès est le plus rapide et le plus sûr, et en supposant qu’il n’y en ait point qui s’accommodent à tous les esprits, la raison nous conseille de choisir celles qui sont appropriées à l’intelligence du plus grand nombre. Il y a dans l’éducation quelques principes généraux établis sur l’expérience de tous les siècles et dont il serait dangereux de s’écarter. On peut, par exemple, affirmer que l’enseignement qui convient le mieux à