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mesures coercitives furent sur son ordre prises contre l’évêque de Pamiers. On le menaça de la saisie de son temporel s’il n’obéissait pas aux arrêts du conseil. Caulet tenta vainement de détourner le coup en écrivant par deux fois au roi. Son temporel fut saisi ; il recourut alors à l’appui du saint-siège.

Autour de cette opposition pouvaient s’en grouper bien d’autres ; elle avait causé dans l’épiscopat une vive agitation, à laquelle la mort de Caulet, arrivée bientôt après, ne mit même pas un terme. La résistance de cet évêque trouva de l’écho, tout au moins de la sympathie chez trois autres prélats, les évêques de Rieux, d’Agde et de Saint-Pons. Voyant le temporel de leur collègue séquestré, ils prirent à leur charge tous les frais de son entretien. Dans le diocèse de Pamiers, la saisie mise sur les revenus de l’évêque fut étendue aux bénéfices qui en dépendaient. Caulet mort, le chapitre de Pamiers nomma des vicaires généraux capitulaires. L’archevêque de Toulouse, auquel les régalistes en avaient appelé à titre d’autorité métropolitaine, du vivant de Caulet, qui les avait frappés de censures ecclésiastiques, en nomma de son côté. Les jésuites, qui gardaient rancune à la mémoire d’un prélat avec lequel ils avaient eu de graves démêlés, prirent chaudement le parti des régalistes, et le diocèse de Pamiers se trouva ainsi en proie à la plus déplorable division. Pour y porter remède, le pape envoya à l’église de Pamiers un bref qui cassait le choix fait par l’archevêque métropolitain et confirmait celui du chapitre, menaçant d’excommunication ceux qui persisteraient à reconnaître les vicaires généraux désignés par l’archevêque de Toulouse. Le parlement de Paris répondit par un arrêt à la lettre du souverain pontife, dont il affectait au reste de contester l’authenticité, d’accord en cela, contre l’ordinaire, avec les, jésuites. Le parlement de Toulouse se prononça dans le même sens et les deux cours apportèrent. une regrettable passion dans leurs poursuites contre tous ceux qui faisaient cause commune avec l’église de Pamiers. Le parlement de Toulouse alla même jusqu’à condamner à mort et à faire exécuter en effigie dom Cerle, que le parti antirégaliste avait nommé grand vicaire de Pamiers, assimilant les menées de ce religieux à une conspiration contre la sûreté de l’état, sentence qui n’empêcha pas au reste Cerle d’entretenir la résistance du fond de sa retraite.

Tel fut le point de départ de la longue contestation qui s’éleva entre Louis XIV et le saint-siège, et où s’entremit activement l’ambassadeur de France à Rome, le cardinal d’Estrées. L’assemblée du clergé de 1680 ne pouvait garder le silence en cette conjoncture ; elle intervint et donna son avis. La question divisait alors le corps ecclésiastique en deux partis, les régalistes et les antirégalistes.