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dénommées est un obstacle sérieux à l’extension de ces tarifs spéciaux : que sera-ce lorsque nous aurons la taxe unique dont on nous menace?

Il faut le répéter encore, toutes ces erreurs n’ont qu’une cause : le point de départ est faux. Un transport est une partie intégrante de toute opération commerciale, il doit donc être régi par une seule et unique loi : l’offre et la demande ; il a une valeur propre, et si le tarif ne représente pas cette valeur, il n’y a plus de base. Une même marchandise a des valeurs différentes suivant les points de la France : le kilogramme de beurre vaut 2 francs en Bretagne, 4 francs en Provence, 5 francs à Paris ; il en est de même d’un transport, et vouloir imposer une taxe unique, c’est renouveler les erreurs funestes du maximum.

Espérons qu’on ne persévérera pas dans cet ordre d’idées et qu’on reviendra aux vrais principes. Nous croyons que l’organisation actuelle est excellente : un tarif général s’appliquant à tous les cas et des tarifs spéciaux discutés entre le transporteur et l’expéditeur pour les cas particuliers. Que dans cette discussion il y ait des plaintes, il y ait des désaccords, il est impossible qu’il en soit autrement. Qu’il y ait même des fautes commises par les compagnies, cela n’est pas douteux, c’est le sort de toute institution humaine. Cependant, depuis bien des années, nous suivons la polémique qui est soulevée en matière de tarifs; toutes les fois que nous avons rencontré une objection, un reproche, nous l’avons étudié; nous avons toujours trouvé une bonne raison. Mais le propre de l’organisation actuelle, c’est précisément son élasticité, c’est la faculté qu’elle présente de corriger une anomalie, une erreur, une faute, sans compromettre l’ensemble du système. Nous croyons donc qu’il n’y a qu’à persévérer dans cette voie.

Remarquons en passant que, dans tout ce qui précède, nous n’avons fait aucune allusion au projet d’exploitation par l’état; cette question est toute différente, et nous n’avons pas voulu l’aborder. Une administration d’état peut adopter le même système de tarification que les compagnies; ce que nous avons cherché à prouver, c’est que tout autre est vicieux et conduirait à des conséquences fatales au public.


IV.

Est-ce à dire qu’il n’y a rien à faire? Ici, il faut s’entendre.

Si l’industrie des transports est une industrie véritable, si l’expéditeur doit payer intégralement le service rendu en laissant au transporteur un bénéfice raisonnable, si cette industrie doit apporter,