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Réduction des taxes. — Mais au moins ce système a-t-il l’avantage de donner lieu à des taxes plus faibles, car c’est là ce qui touche le plus le commerce et c’est le prétexte qu’on met en avant pour réformer l’organisation actuelle.

Si nous examinons la tarification des chemins de fer d’Alsace-Lorraine et si nous la comparons avec la tarification des chemins de fer de l’Est, nous arrivons à un résultat tout à fait inattendu. Les tarifs sont plus élevés en Alsace qu’en France. Le caractère de cette étude ne nous permet pas de faire une comparaison minutieuse, mais on peut se former un jugement en prenant les deux points extrêmes de la tarification. Les expéditions partielles à 100 kilomètres coûtent en Alsace-Lorraine 0 fr. 17 par tonne et par kilomètre, et les produits de troisième classe, transportés à 400 kilomètres, sont taxés 0 fr. 03 1/2. Si nous prenons le tarif du cahier des charges pour les chemins de fer de l’Est, nous trouvons que la première classe est taxée 0 fr. 16 et la quatrième 0 fr. 04. Or nous avons expliqué que le tarif du cahier des charges est un maximum au-dessous duquel les compagnies se tiennent toujours, et si on faisait intervenir dans le calcul les tarifs spéciaux, les écarts deviendraient très grands.

Le commerce alsacien n’a donc pas à se louer du changement de système ; cette conséquence était, du reste, facile à prévoir. Si on ne veut pas entrer dans le détail des parcours spéciaux et des marchandises spéciales, si on reste dans les généralités, on est amené à maintenir des tarifs élevés, parce que le moindre abaissement a des conséquences trop graves. Avec le système français, ces conséquences sont limitées : le jour où la compagnie consent une réduction de tarif pour des minerais de fer allant de Bourges à Montluçon, elle sait où elle va ; elle connaît approximativement le tonnage auquel s’appliquera la réduction. Mais si cette réduction s’étend à toute une classe de marchandises, sur n’importe quel parcours, elle craint d’être débordée et elle n’abaisse pas son tarif.

Ces hésitations se sont révélées dans les chemins d’Alsace eux-mêmes. Immédiatement après l’annexion, on avait établi des tarifs extrêmement bas; c’était un don de joyeux avènement, mais cela ne pouvait durer, et, à deux reprises différentes, on a déjà relevé les tarifs; l’augmentation totale a été de 30 à 40 pour 100.

On a encore introduit une autre modification dans le système primitivement adopté en 1871. Il n’y avait dans le principe que deux catégories : les marchandises hors classe et une classe unique de marchandises classées. Aujourd’hui, il y a trois classes de marchandises classées. On se rapproche ainsi peu à peu du système français. Remarquons, en effet, qu’un tarif spécial se préoccupe de