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sur les seuls points de tangence, et les impressions se produisent comme dans la nature.

Chacun connaît pour l’avoir observée directement, ne fût-ce que sur les ardoises de nos toits, la texture schisteuse ou feuilletée. On l’appelle souvent clivage dans les couches stratifiées, et foliation dans les roches dont les minéraux en paillettes s’orientent dans le sens des feuillets ou se moulent sur des grains résistans. Plus fréquente dans les vieilles assises du globe, cette structure affecte des formations de tout âge, calcaires tertiaires dans les Alpes ou quartzites anciens dans les Ardennes, et les roches les plus différentes, gneiss, protogine, leptynite ou porphyre. La phonolite d’Auvergne, le trachyte du Velay ou les laves de Santorin peuvent souvent se débiter en dalles aussi bien que les micaschistes de Bretagne. Beaucoup de roches, lors même qu’elles ne sont pas schisteuses à l’œil nu, laissent discerner par l’analyse microscopique une texture fluidale très caractérisée, ainsi que l’a montré M. Michel Lévy. La schistosité d’ailleurs, comme la stratification, n’offre pas moins d’extension que de diversité : le gneiss à lui seul semble être le soubassement ordinaire de l’écorce terrestre et dans tous les massifs montagneux les roches feuilletées prennent un grand développement. Bien qu’on ait eu recours d’abord pour expliquer ces faits à des causes occultes, pour ainsi dire, telles que l’électricité, le magnétisme, la cristallisation, les dernières observations devaient faire soupçonner que l’origine en est exclusivement mécanique. La schistosité, en effet, indépendante de la direction des couches, mais en rapport avec les axes de redressement, apparaît dans les masses tourmentées pour leur imprimer un caractère commun. C’est ainsi que, sur les immenses plissemens qui rendent si pittoresques les environs du Bourg-d’Oisans, les argiles du lias ont pris l’aspect feuilleté des ardoises siluriennes de l’Anjou. On en trouve encore un indice dans la déformation des fossiles enfouis dans les couches devenues schisteuses : ils ont été visiblement amincis, étirés et souvent tronçonnés. L’expérience pouvait donc sur ce point devenir décisive.

M. Sorby d’abord, en comprimant de l’argile mélangée de paillettes d’oligiste, obtint une masse feuilletée, et M. Tyndall une véritable ardoise en laminant de la terre de pipe ou de la cire d’abeilles. M. Daubrée par d’autres procédés parvint à des résultats analogues. Mais ensuite, profitant des belles recherches de M. Tresca, il a pu récemment, avec le concours de cet habile expérimentateur, donner plus de netteté à l’imitation des faits naturels. Une matrice en fer, cylindrique ou prismatique, reçoit l’argile amenée à une consistance convenable ; un piston poussé par la presse hydraulique oblige la pâte à s’échapper en jet par un orifice de petite section