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expressions plus fortes encore ! C’est de lui que venait ce fameux « cri de douleur » qui allait retentir dans toute l’Italie.

Mêlé à tous les drames où s’est jouée la destinée de son pays, quelquefois malheureux, La Marmora en imposait par sa loyauté, et c’est pour faire respecter cette loyauté qu’il publiait, il y a quelques années à peine, ce livre si saisissant : Un po’ piu di luce, qui dérangeait passablement la diplomatie de M. de Bismarck, qui dérangeait aussi un peu la politique du cabinet de Rome à ce moment. Il était accusé d’avoir commis une indiscrétion; il-avait parlé avec sa rude franchise, et dans un temps où les vaincus ont souvent tort, le général La Marmora avait enfin un mérite : il n’avait cessé de s’intéresser ardemment à la France. Il avait ressenti nos deuils; jusqu’à la mort, il gardait pour nous l’espérance !


CH. DE MAZADE.



Allen. — Histoire du Danemark, traduction française de M. Beauvois, 2 vol. in-8o, 1870.


L’actif et intelligent éditeur de Copenhague, M. Höst, a été bien inspiré quand il s’est résolu à donner cette traduction française d’un ouvrage devenu classique dans le Nord et en Allemagne. Une première preuve en serait la nécessité de montrer ce que vaut la traduction allemande de ce livre, où se trouvent singulièrement modifiées, sans avis préalable, et bien entendu sans le consentement de l’auteur, les pages concernant, de près ou de loin, les questions politiques si cruellement agitées naguère entre le Danemark et l’Allemagne. Ce n’est pas dans la traduction allemande qu’il faudra étudier les origines de la trop fameuse affaire des duchés; les Allemands eux-mêmes feront bien, s’ils veulent être un jour impartiaux sur ce sujet, de consulter la traduction française : elle reproduit fidèlement toute l’argumentation de l’auteur, révisée et complétée par lui; elle conduit de plus l’histoire de ces tristes et instructifs débats jusque vers la fin, que nous connaissons aujourd’hui, et qu’en lisant M. Allen on peut prévoir.

Cet ouvrage a été écrit à la fois pour servir de manuel dans l’enseignement national et pour être lu par les gens du monde. C’est dire que l’auteur, sans laisser voir indiscrètement tout l’échafaudage de son érudition, a dû faire œuvre de science, en même temps particulière et générale, étudier les chroniques et en extraire la seule substance, comprendre jusque dans le détail la vie danoise aux différens âges et la peindre par des traits bien choisis et habilement interprétés. Ce programme de tout historien national, M. Allen l’a très bien compris. Appartenant, en politique, au parti vraiment libéral qui revendiquait l’autonomie du Danemark en présence des agressions coupables de l’Allemagne, à ce groupe de bons esprits qui n’aurait pas cédé le Slesvig,