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main-d’œuvre en présence de la même augmentation de salaires, est générale et doit être attribuée à la corruption de l’esprit des travailleurs opérée par les émissaires des unions ouvrières.

« Les saisons défavorables que nous avons eu à subir. pendant les dix et surtout pendant les quatre dernières années, ont également affecté gravement les intérêts des fermiers. La sécheresse des années 1868, 1870, 1874, 1876 a été désastreuse pour les récoltes et la disette des fourrages a entraîné la diminution du bétail. Qu’on ajoute à cela l’invasion de la fièvre aphteuse, qui, en 1872, sévit avec une si désastreuse intensité et causa des pertes évaluées à plusieurs millions de livres sterling. Mais ce sont les maigres récoltes de céréales des quatre dernières années qui ont été de beaucoup au-dessous de la moyenne, tandis que le cours des marchés a constamment baissé, qui ont le plus contribué au malaise dont nous nous plaignons. Je n’hésite point à dire que de ma vie je n’ai vu un avenir aussi alarmant pour les cultivateurs, et nous sommes loin de pouvoir affirmer que nous sommes arrivés au point qui marque la limite extrême du mal et le commencement du mieux… Le monde entier vient sur nos propres marchés nous faire une concurrence inégale, tandis que la rente de la terre s’est élevée au plus haut degré possible…

« Quant aux remèdes à employer pour parer au désastre qui nous menace, la réduction de la rente est une nécessité immédiate ; cette réduction viendra infailliblement ; les propriétaires qui se soumettront les premiers montreront, en fin de compte, qu’ils sont les plus sages, car les autres courront le risque de voir leurs terres sans tenanciers, ce qui équivaudra à l’absence de revenu. Il serait nécessaire qu’ils augmentassent les logemens d’ouvriers, les bâtimens d’exploitation, les abris pour le bétail et qu’ils accordassent aux fermiers toutes les améliorations nécessaires. Ce n’est pas avec des rentes exagérées, des bâtimens insuffisans, des clauses restrictives dans les baux, aucun encouragement pour les améliorations faites par le fermier, qu’on pourra attirer vers la terre une classe de gens instruits et pouvant disposer de capitaux. On ne peut exiger de ceux-ci qu’ils reprennent les anciennes mœurs des cultivateurs, qu’ils endossent la blouse, se lèvent avant le jour et mangent du lard à leur dîner, car le capital et l’intelligence comportent leur juste récompense aussi bien dans la classe agricole que dans toute autre. Revenir au système protecteur est aujourd’hui impossible, il n’y faut pas songer, et chercher à réduire les salaires par force ne serait ni sage ni pratique. Mais ce qui est recommandable, c’est l’exercice aussi strict que possible. de l’économie dans les dépenses personnelles par ceux qui s’aperçoivent que leurs moyens diminuent, et à ceux qui ont encore conservé