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étrangers demandant des garanties qui manquaient, et le plus souvent les spéculateurs en étaient pour leurs frais.

On finit par demander aux provinces de s’engager directement. Elles s’empressèrent d’y consentir. En général, la forme de ces engagemens fut la promesse d’une garantie d’intérêt de 7 pour 100 sur un capital fixé, ou d’une subvention de 25,000 francs par kilomètre pour une voie de 1 mètre de largeur. Comme on le voit, c’était aussi l’inauguration de la voie étroite[1]. L’intervention des administrations locales ne produisit quelques résultats heureux que dans les régions où se cultive le café, et par conséquent dans celles où les chemins de fer développèrent la production du pays, c’est-à-dire en Minas Geraes, en Rio-de-Janeiro et en Sao-Paulo ; mais il n’y eut de succès positif éclatant que dans cette dernière province, où la fertilité du sol, l’intelligence des propriétaires, la bonne administration des compagnies formées concoururent à l’affirmer. Dans cette contrée favorisée, le chemin à grand trafic, du port de Santos à Jundiahy, concédé par le gouvernement central, pendant la première période, avait été terminé en 1867 et n’avait pas tardé à donner de gros bénéfices. On pouvait déjà prévoir qu’il n’aurait pas longtemps recours à l’appui de l’état. Aussi, du moment que les tracés des lignes provinciales s’embranchant sur ce tronc commun furent arrêtés, tous les planteurs des localités traversées s’empressèrent-ils de souscrire les actions d’entreprises si propres à faciliter l’écoulement de leurs produits. Grâce à cet heureux concours de circonstances, aujourd’hui la ligne de Santos non-seulement ne fait pas appel à la garantie de l’État, mais elle a déjà remboursé la plus grande partie des avances qui lui ont été faites, sous cette forme, par le Trésor, et elle permet de distribuer, 12 pour 100 de dividende à ses actionnaires ; de plus 644 kilomètres de chemins de fer, à voie étroite, greffés sur cette souche principale, sont actuellement en trafic ; cinq compagnies brésiliennes les exploitent avec des succès divers[2] et luttent entre elles pour obtenir le droit de prolonger le réseau sans subvention ni garantie d’intérêt. Mais, répétons-le bien vite, ces faits sont tout exceptionnels, et les résultats du système de concession directe par les provinces ont été généralement déplorables, ont provoqué beaucoup d’abus, et le crédit des administrations locales s’est trouvé tout à fait insuffisant pour assurer aux sociétés en formation les capitaux nécessaires. En 1873, ce système était déjà jugé lorsque le cabinet de Rio,

  1. Il y a aujourd’hui au Brésil des voies de toutes dimensions, lm, 60, — 1m, 40, — 1m, 10, — 1m, 06 et 1 mètre.
  2. La compagnie Pauliste a donné en 1878 des dividendes de 8 pour 100 à ses actionnaires ; d’autres rendent moins.