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est, pour une culture donnée et sur un sol déterminé, l’engrais le plus économique et le plus rémunérateur à employer. Jusque-là il faut bien s’en tenir à la vieille méthode des assolemens plus ou moins perfectionnés, qui ont pour objet de varier les cultures d’une année à l’autre, de façon à utiliser les divers élémens contenus dans le sol et à éviter de l’épuiser, en lui demandant toujours les mêmes récoltes. Il s’est néanmoins formé en Angleterre une école de cultivateurs qui repousse tout assolement et s’en tient, à la production exclusive du blé. Les expériences de M. Lawes, à Rothamsted, ont prouvé qu’en se bornant à restituer au sol les élémens enlevés, celui-ci ne s’épuise pas et peut produire indéfiniment la même chose. Avec ce système, le bétail devient inutile, puisqu’on ne fait plus usage de fumier, et l’on peut vendre même les pailles, qui sont très recherchées pour la fabrication du papier. Rien ne prouve cependant qu’au point de vue du bénéfice réalisé cette méthode soit préférable à l’ancienne, et nous nous garderons bien de la recommander aux cultivateurs français.

Si l’agriculture des départemens du nord laisse peu à désirer, il n’en est pas de même dans les départemens du centre et du midi, où les conditions de climat sont moins favorables à la culture des racines, où l’absence de capitaux arrête souvent les améliorations foncières les plus utiles. Partout où le sol s’y prête, on cultive la vigne ; mais partout ailleurs, surtout dans les montagnes, on s’en tient au pâturage. Les herbages et l’élève du bétail devant devenir la principale ressource d’un grand nombre de départemens, on peut considérer comme une amélioration agricole de la plus haute importance le développement que les irrigations ont pris dans ces derniers temps, développement que le gouvernement a favorisé par l’institution de concours spéciaux.

L’eau est indispensable à la végétation ; non-seulement elle charrie dans les plantes les substances fertilisantes qu’elle tient en dissolution et dont sont en partie formés les tissus, mais elle entre dans la composition de ceux-ci, soit à l’état hygrométrique, soit par les élémens qui la constituent. De plus, sous l’influence de la chaleur, elle circule dans les vaisseaux et s’évapore par les parties vertes en provoquant, selon toute apparence, par cette transpiration la décomposition de l’acide carbonique de l’air et en déterminant l’absorption du carbone, qui est l’élément principal de la constitution des plantes. Elle est donc avec la chaleur, quelle que soit d’ailleurs la composition du sol, un des facteurs indispensables à la végétation, qui languit ou se développe avec vigueur suivant que l’eau vient à manquer ou qu’elle se rencontre en abondance. C’est pour mettre à profit cette action bienfaisante qu’on a imaginé les