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et déclara tout de suite posséder en abondance de beaux arbres. Sur l’instant, une excursion à la forêt ayant été proposée, on courut à la pirogue. Après une navigation qui dut s’arrêter au confluent de deux petits cours d’eau formant la Cowa, on n’eut pas à cheminer longtemps sur la rive avant d’être au milieu de massifs de pins au tronc droit et superbe. Il ne s’agissait plus vraiment que d’abattre nombre de ces pins et de les abandonner au fil de l’eau qui les transporterait jusqu’à la mer. Le chef néo-zélandais livrant ses arbres et fournissant des ouvriers pour les couper eut sa rémunération : une hache ; à l’époque, il n’en coûtait guère aux Européens peu généreux de faire de grosses acquisitions. En visitant une assez grande partie de la côte méridionale de la baie, la caravane put contempler des sites ravissans, des forêts magnifiques, et se mêler à des populations bienveillantes. S’offrit l’occasion d’apprécier l’instinct d’imitation chez les insulaires ; des enfans avaient fabriqué, dans des proportions très réduites, une sorte de modèle de l’Active ; de la part de petits sauvages, c’était à remarquer. Sur le territoire de Waïcadi, on aperçut le chef assis sur le toit de sa maison, mode usité par les principaux personnages quand ils veulent manifester à tous les yeux le haut rang qu’ils occupent dans le monde. Des circonstances apprirent aux Anglais que certains chefs portant le nom d’Arikis ont sur les autres, les Rangatiras, une prééminence considérable pendant la guerre ; ils exercent le commandement suprême.

De retour à Rangihou, les voyageurs eurent la satisfaction de voir comme on avait bien travaillé en leur absence. Une case occupant la longueur d’une vingtaine de mètres était presque achevée ; à l’intérieur des cloisons la partageaient en quatre appartemens : un pour chaque famille. La forge s’installait, du charbon se fabriquait. A examiner la vie des indigènes, on se plaisait à concevoir l’espérance de former sans trop de peine de bons ouvriers. Au village, l’oisiveté semblait bannie ; hommes et femmes se livraient, près des demeures, à la confection des nattes, dans les champs à la récolte des pommes de terre. Dans une excursion, on aborda une île déserte ; des huttes abandonnées, la plupart en ruines, annonçaient un désastre. En ce lieu paisible vivait autrefois une partie de la population de Rangihou ; des équipages de baleiniers, sous le prétexte de venger l’événement de Wangaroa, avaient pourchassé et massacré des gens toujours restés inoffensifs envers les Européens.

Hongi étant venu à Rangihou, le chapelain de la Nouvelle-Galles du Sud et M. Nicholas se rendirent sous sa conduite au territoire où s’exerçait sa domination : Waïmata. Sans avoir le caractère grandiose d’autres régions de la Nouvelle-Zélande, le pays ne manque