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l’empire, entre les Guelfes et les Gibelins, la famille des Frangipani occupe l’arc de Constantin, celui de Titus, le Septizonium construit par Septime Sévère sur la pente méridionale du Palatin, et le Colisée; les Caëtani, cette puissante famille qui a donné quatre papes, dont Boniface VIII, et qui a encore ses illustres représentans à Rome, s’emparent du tombeau de Cecilia Metella sur la voie Appienne, et de l’île Tibérine ainsi que la Torre della Milizia en ville; les Orsini détiennent le tombeau d’Adrien, le théâtre de Pompée, le mont Giordano et le campo del Fiore; les Colonna ont le mausolée d’Auguste et les thermes de Constantin au Quirinal ; les Savelli prennent le théâtre de Marcellus et l’Aventin. Rome se hérisse de tours édifiées sur les monumens antiques. Encore au XVIIIe siècle on chercherait en vain sur l’intéressante gravure de Vasi, de 1765, l’arc de Titus : il a disparu, sauf une partie de la façade inférieure, sous la maçonnerie dont on l’a revêtu pour le réunir en une seule fortification avec Sainte-Françoise romaine. Dans ces vastes monumens qu’elles se sont appropriés, les familles et leurs nombreux cliens s’établissent, se fortifient, et n’ont pas de peine à se défendre ; mais les attaques sont vigoureuses et fréquentes, et les assaillans, s’ils n’atteignent pas leur ennemi, se vengent sur l’édifice. Quand Robert Guiscard prend et saccage la ville, en 1084, c’est le signal de la ruine pour le Septizonium, que plus tard Sixte-Quint, par une autre sorte de profanation, achèvera de faire disparaître. Au même temps le Cælius et l’Aventin, pris d’assaut, deviennent les tristes solitudes qu’on voit aujourd’hui; la population des collines, pourchassée, achève de se grouper dans l’ancien Champ de Mars, où se formera de la sorte la Rome moderne. Lorsqu’en 1253 le sénateur Brancaleone détruira jusqu’à cent quarante des tours féodales, on pense bien qu’avec elles disparaîtront en mainte occasion tout au moins les parties supérieures des édifices qui leur servaient de base.

Le second danger auquel sont exposés les monumens romains pendant le moyen âge est d’être mutilés pour servir à de mauvaises constructions ou à des réparations impuissantes. On ne sait plus bâtir qu’en se servant de débris ou de morceaux antiques. C’est ce qui fait que presque tout vieux mur, dans la Rome actuelle, recèle des fragmens sculptés. On pourrait en citer de très nombreux exemples. — L’année dernière, en démolissant un des bastions dont la Porta del popolo était flanquée, on a rencontré les restes d’un beau monument funéraire qui avait longtemps orné cette partie de la voie Flaminienne. Un de ces débris nous a fait connaître la curieuse inscription d’une jeune fille qui a été, dit son père, païenne entre les païens, mais entre les chrétiens chrétienne. — Dans