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ces circonstances font des tremblemens de terre un phénomène très complexe.

Le niveau des laves, dans les volcans actifs, devrait laisser voir aussi une sorte de marée, mais les observations manquent à cet égard. Le seul fait de ce genre que l’on connaisse a été noté par MM. Scacchi et Palmieri, au mois de mai 1855, pendant l’éruption du Vésuve. Ces physiciens ont remarqué une recrudescence des laves, deux fois par jour, à des intervalles de douze heures environ, et avec un retard d’un peu moins d’une heure, d’un jour à l’autre, comme on le constate pour les marées de l’Océan. L’éruption avait commencé le 1er mai, et l’intumescence périodique de la coulée a été observée depuis le 5 jusqu’au 19. Des observations régulières de cette nature seraient peut-être faciles à instituer dans l’île d’Havaii, sur les bords du lac de laves de Kilauea.

Il ne faut pas d’ailleurs perdre de vue que ces marées souterraines ne prouveraient nullement la liquidité du noyau, mais seulement l’existence d’une nappe liquide d’une certaine épaisseur. Nous verrons comment les phénomènes astronomiques peuvent fournir des données pour la solution de la question ; mais il convient de nous arrêter d’abord aux considérations purement physiques qui ont été invoquées pour la trancher.

M. James Thomson a fait voir le premier que la compression devait abaisser le point de fusion et par suite retarder la congélation des liquides qui se dilatent en se solidifiant; c’est ce qui a été vérifié pour l’eau, et ce qu’on observerait sans doute aussi pour la fonte de fer, qui est dans le même cas. Au contraire, pour les substances, beaucoup plus nombreuses, qui se contractent en se solidifiant, la compression est un moyen de faciliter la congélation par refroidissement; elle doit donc élever le point de fusion, et c’est ce qu’on a pu vérifier pour beaucoup de corps. Ainsi, le point de fusion du soufre, qui éprouve un retrait sensible en devenant solide, s’élève de 107 degrés à 140 degrés sous une pression de 800 atmosphères. Or, d’après les expériences de Bischof, la plupart des roches sont dilatées par la fusion et se contractent en se solidifiant; le granit, les schistes, le trachyte, perdent un cinquième de leur volume en redevenant solides. Ceci posé, il devient probable, dit sir W. Thomson, que le noyau de la terre est depuis longtemps solidifié.

En effet, concevons la terre d’abord entièrement liquide; il s’établira dans la masse une sorte d’équilibre des températures où une température déterminée correspond à une pression donnée. Cette masse venant à se refroidir, la solidification pourra, en thèse générale, commencer soit au centre, soit à la surface; la question est très complexe et ne peut être résolue que si l’on connaît certaines propriétés du liquide considéré. Mais en admettant que la