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cette limite. Sous des pressions plus fortes, l’ébullition exige une température plus élevée (le point d’ébullition est la température à laquelle la tension de la vapeur égale la pression qui pèse sur le liquide). Ainsi l’eau bout à 180 degrés sous une pression de 10 atmosphères, à 225 degrés sous 25 atmosphères, etc.; au delà de ces limites, la loi qui règle le phénomène de l’ébullition n’est pas exactement connue, mais on sait que la tension de la vapeur augmente beaucoup plus vite que la température, et l’on peut admettre qu’elle approche de 1,200 atmosphères vers 600 degrés, de 5,000 atmosphères vers 1,000 degrés, etc. Dès lors il est clair qu’il y aura une profondeur où la tension de la vapeur deviendra égale à la pression, où par conséquent l’eau pourra entrer en ébullition. En admettant que la température du sol augmente de 1 degré par 20 mètres, on aurait déjà 600 degrés à 12 kilomètres, et ce serait à cette profondeur que la tension de la vapeur égalerait la pression (il faudrait descendre plus bas si l’on adoptait une progression moins rapide des températures). Or, si l’eau commence à bouillir au-dessous d’un certain niveau, les vapeurs monteront à travers la masse et s’y condenseront de nouveau comme dans un réfrigérant, en lui cédant une partie de leur chaleur; grâce à cet apport incessant, les couches supérieures du liquide pourront s’échauffer peu à peu bien au delà du degré de chaleur qui règne au même niveau dans le sol. L’ébullition peut même se propager jusqu’à la surface, comme cela se voit dans les geysers de l’Islande.

En admettant de même que, dans les régions volcaniques, la température de 1,000 degrés existe à environ 20 kilomètres au-dessous de la surface, la vapeur qui se forme à cette profondeur peut acquérir une tension supérieure à 5,000 atmosphères, et qui suffirait à soutenir le poids d’une colonne de lave de 20 kilomètres de hauteur. Une température de 1,300 degrés comporterait probablement une tension de 10,000 atmosphères, — c’est à peu près le maximum de l’effort que les gaz de la poudre produisent dans l’âme d’un canon de gros calibre, — et l’on voit qu’il y aurait là une force plus que suffisante pour expliquer les effets mécaniques dont les volcans nous offrent le terrifiant spectacle.

En tous cas, les volcans sont des témoins irrécusables de l’existence d’un foyer souterrain : ils semblent vraiment les mille portes de l’enfer où couve le feu éternel. Le nombre des volcans connus s’accroît sans cesse avec les progrès de la géographie, parce que parmi les contrées les moins explorées se rencontrent des régions éminemment volcaniques. A. de Humboldt en énumère 407, parmi lesquels 225 encore actifs; on en connaît aujourd’hui plusieurs milliers, et d’après M. Fuchs le nombre des volcans actifs peut être