Page:Revue des Deux Mondes - 1879 - tome 35.djvu/897

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

et les plus grandes profondeurs océaniques n’y dépasseraient pas 1 centimètre.

Si petites que soient toutes ces inégalités relativement aux dimensions de la terre, elles ne peuvent échapper à l’observation, puisqu’elles nous apparaissent sous la forme de montagnes et de vallées. Néanmoins la recherche de la véritable figure de la terre est un des problèmes les plus épineux qui soient, dès qu’il s’agit de sortir des approximations dont on peut se contenter dans un traité de géographie. Depuis Newton, on avait toujours admis que la terre était un ellipsoïde de révolution, en d’autres termes que les méridiens étaient des ellipses, l’équateur et tous les parallèles des cercles; on cherchait seulement à déterminer, une fois pour toutes, l’ellipticité propre à ces méridiens, et supposée partout la même. Il y a vingt ans, les calculs du capitaine Clarke, fondés sur l’ensemble des grandes triangulations qui avaient été exécutées jusqu’alors dans les différentes parties du monde, conduisirent à cette conclusion que l’équateur lui-même avait une forme elliptique, que les méridiens, par conséquent, étaient des ellipses inégalement aplaties. D’après Clarke, l’aplatissement de l’équateur était de 1/3270, c’est-à-dire environ dix fois plus petit que l’aplatissement moyen des méridiens; il représentait donc une dépression de 2 kilomètres, et cette dépression existait sous le méridien qui passe, à l’est, par l’archipel de la Sonde et à l’ouest par l’isthme de Panama, tandis que le renflement se trouvait sous le méridien de Vienne, qui traverse l’Europe centrale et l’Afrique. La terre était, en définitive, un ellipsoïde à trois axes inégaux; et ce résultat pouvait à la rigueur se concilier avec l’hypothèse de la fluidité primitive de la terre, car la forme en question est comprise parmi les figures d’équilibre que peut prendre un liquide en rotation. Toutefois, en y regardant de près, on trouve que les calculs de Clarke ont pu être fortement influencés par des anomalies qui existent probablement dans quelques-uns des réseaux géodésiques employés, et il semble que la majorité de ceux qui ont quelque autorité en ces matières soit revenue à l’ellipsoïde de révolution.

Lorsqu’on dit : figure de la terre, on entend par ces mots la forme géométrique d’une surface idéale qui coïncide avec le niveau moyen de la mer libre, et qu’on prolonge par la pensée au-dessous des continens. En effet, les opérations géodésiques sont toujours réduites, par le calcul, « au niveau de la mer, » après que les altitudes des stations ont été déterminées par des nivellemens qui partent du littoral le plus proche. La grande difficulté, c’est de définir exactement ce niveau pour une station donnée. Longtemps on s’est contenté d’admettre qu’en un point quelconque du globe la surface idéale de la mer libre était une surface