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ne cesseront pas d’exister comme états indépendans, et il est assurément peu vraisemblable que l’empereur méconnaisse en même temps les devoirs attachés au pouvoir qu’il tient des comices et la gloire personnelle qu’il a acquise en rendant deux fois à l’indépendance des états qu’il avait deux fois conquis.

« On peut se demander, à l’égard de la Suisse, qui a empêché sa réunion à la France avant l’acte de médiation? Cet acte, résultat immédiat des soins et des pensées de l’empereur, a rendu la tranquillité à ces peuples, et la garantie de leur indépendance et de leur sûreté, tant qu’eux-mêmes ne briseront point cette égide en substituant aux élémens dont elle est formée les volontés d’un des corps constitués ou d’un des partis.

« Si la France eût voulu réunir la Hollande, la Hollande serait française comme la Belgique. Si elle est puissance indépendante, c’est que la France a senti à l’égard de ce pays, ainsi que pour la Suisse, que les localités exigeaient une existence individuelle et une organisation particulière.

« Le Hanovre est l’objet d’une supposition qui a quelque chose de plus ridicule. La réunion de cette province serait le présent le plus funeste qu’on pût faire à la France, et il ne fallait pas de longues méditations pour s’en apercevoir. Le Hanovre deviendrait un sujet de rivalité entre le peuple français et le prince qui s’est montré l’allié et l’ami de la France dans un temps où l’Europe était conjurée contre elle.

« Le Hanovre, pour être conservé, exigerait un état militaire dont les dépenses seraient hors de toute proportion avec quelques millions qui constituent tous les revenus de ce pays. Le gouvernement, qui a sacrifié aux principes de la nécessité d’une ligne de frontières simple et continue jusqu’aux fortifications mêmes de Strasbourg et de Mayence, sur la rive droite, serait-il assez peu éclairé pour vouloir l’incorporation du Hanovre? Mais on dit qu’à cette possession est attaché l’avantage d’être membre du corps germanique. Le titre seul d’empereur des Français répond à cette singulière idée. Le corps germanique se compose de rois, d’électeurs, de princes, et n’admet relativement à lui qu’une seule dignité impériale. Ce serait d’ailleurs mal connaître la noble vanité de notre pays que de croire possible qu’il consentît à entrer comme élément dans un corps particulier. Si telle chose eût été compatible avec la dignité nationale, qui eût empêché la France de conserver ses droits au cercle de Bourgogne et ceux que lui donnait la possession du Palatinat? Nous le disons même, avec le sentiment d’un juste orgueil que personne ne pourra blâmer, qui a empêché la France de garder une partie des états de Bade et du territoire de la Souabe?