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oppositions des conciles font encore des dernières années du XIVe et des premières du XVe siècle une période profondément troublée. La double énergie de la renaissance, qui ranima alors le respect de l’antiquité et en même temps excita un art vraiment moderne, n’en est que plus remarquable. — C’est le commencement de ce XVe siècle, c’est le pontificat de Martin V, date des plus grands efforts de la cour de Rome pour mettre un terme définitif à tant de troubles, que M. Müntz a choisi comme point de départ dans ses études sur la première renaissance proprement dite. Nous avons dit comment son livre est disposé, avec quelle sage méthode les informations inédites viennent s’y ranger à chaque page. Recherchons avec lui ce que les papes de cette période, sous l’impulsion d’un esprit nouveau, ont prodigué d’efforts et d’ardeur pour la restauration des œuvres subsistantes de l’antiquité, pour la construction de nouveaux édifices d’après les principes d’une architecture indépendante et originale, et pour tout le développement des arts multiples que le soin et la décoration des grands monumens entraînent à leur suite.


II.

Qu’il y ait eu vraiment une renaissance romaine dès le moyen âge, cela n’est pas douteux pour qui observe le grand nombre d’ouvrages originaux d’architecture et de sculpture que Rome a conservés du XIIe et du XIIIe siècle, quoique mutilés et le plus souvent anonymes. Si aux deux siècles suivans la plupart de ses artistes lui viennent du dehors, de l’Ombrie, de la Toscane, de Naples, c’est pour qu’elle les fasse siens par sa puissante influence. Ils contemplent ses arcs de triomphe, ses colonnes, ses sarcophages ; ils se trouvent par elle face à face avec l’antiquité, et sortent de ce commerce agrandis et transformés. Raphaël n’étudiera pas seulement les peintures des thermes de Titus ; en mesurant une à une les principales ruines, il se pénétrera de l’incomparable grandeur de Rome, et il exécutera ces fresques souveraines du Vatican, où la force du génie esthétique égale la hauteur de la conception. Michel-Ange n’eût pas trouvé ailleurs l’inspiration du Moïse, celle du plafond de la Sixtine et de la coupole de Saint-Pierre. De telles œuvres ont été l’expression la plus intense et la plus élevée du mouvement général de la renaissance italienne. Toute une école romaine venue à la suite sera marquée au sceau du grand goût, de l’ampleur et de la dignité.

Le pape Martin V (1417-1431) était Romain et Colonna : double motif pour que, après les discordes à peine suspendues où sa famille